SYNOPSIS :
Le boulanger Rousseau a devant lui un programme chargé :
il doit assassiner les neuf jurés qui ont envoyé
son fils unique à l’échafaud dans la même
journée. Aux commandes de son side-car, chaperonné
par sa vieille mère, il sillonne les paysages du Sud
de la France, de la Camargue au Gard, pour mettre son plan à
exécution. |
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NEUF MEURTRES DANS LA JOURNEE
COMMIS PAR UN SEUL HOMME DONT CE N’EST PAS LE METIER
Première réalisation
de Jean-Louis Trintignant (qui sera suivie en 1978 du Maître
Nageur, également projeté à l’Etrange),
Une Journée Bien Remplie (1972) fait œuvre d’iconoclastie
aiguë dans le contexte du cinéma français
de l’époque. Evoquant à de multiples reprises
une certaine forme de surréalisme anglo-saxon – l’on
s’attendrait presque à voir débarquer John Steed
ou Emma Peel pour stopper le tueur boulanger- Une Journée
bien Remplie déchiquette avec le sourire la bêtise
satisfaite du Français moyen. On imagine aisément
que tout ce qui est " moyen " indiffère
généralement Jean-Louis Trintignant. Mais parfois,
l’arrogance des cons se fait meurtrière, et oblige
à la réaction, à un geste de colère.
Celui du boulanger Rousseau
a été longuement mûri, fignolé
dans ses moindres détails. La méticulosité
qu’il mettra à l’exécution de sa vengeance sera
à la hauteur de l’injustice dont il a été
la victime : la condamnation à mort sur des présomptions
de son fils unique par un jury populaire. Animé par
le sentiment sublime de la colère qui n’accepte aucune
pitié, Rousseau reste cependant un homme digne et compatissant,
comme lorsque s’étant trompé de victime, il
baise gentiment le front de celui à qui il a fait du
tort. Jacques Dufilho compose, dans un mélange de balourdise
primate et de légèreté, un personnage
chaplinesque qui aurait troqué le cynisme (M. Verdoux !)
pour une croyance sans faille en la justesse de sa cause.
La violence qui lui est faite, et qui empreint ses gestes
d’une qualité sacerdotale, n’a d’ailleurs d’égale
que la médiocrité de ses victimes. Ce jury interchangeable
(et l’occasion d’un gag final savoureux) et les créatures
humaines qui apparaissent à leur tour dans le film
dénotent chez Trintignant cinéaste un talent
cruel dans la caricature. Après Chaplin, on pense beaucoup
au travail " d’entomologiste " social
de Jacques Tati, autre maître dans l’art de la silhouette.
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Mais à s’attarder
sur les personnages, on risquerait de trahir le film :
le massacre de la scène finale d’Hamlet par " La
Troupe des Enfants du Gard " en dit assez long sur
la place que Trintignant accorde au théâtre,
pour ne pas focaliser l’attention sur ce qui en reste dans
son film. Une Journée Bien Remplie est d’abord
un chef d’œuvre de misanthropie distinguée, opposant
à la médiocrité et au dérisoire
le droit à trouver de la beauté dans tout, d’une
grue mécanique aux manœuvres d’une garnison de C.R.S.
Tati encore ?
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Titre : Une Journée Bien
Remplie
Réalisation :
JeanLouis Trintignant
Acteurs : Jacques
Dufilho , Luce Marquand , André Falcon
, Vittorio Caprioli
Production : Jacques
E. Strauss
Durée : 87 minutes
Année :
1972
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