Le réalisateur pose ici un vrai défi cinématographique :
suivre la quête intérieure d’un personnage complexe
à travers la nature sauvage du Mexique. Une audace subtilement
mise en scène, un pari réussi, avec à la
clé, une maîtrise visuelle ébouriffante
et une temporalité qui s’étire, imposant au spectateur
impatient son rythme très lent. Le film suit ainsi la
laborieuse recherche d’identité de l’homme transcendée
par une sublimation de la nature qui trouve son aboutissement
dans les longs plans aériens et les éternels panoramiques
embrassant pleinement la luxuriante nature.
Mais au-delà des somptueux paysages du Mexique, c’est
tout le rapport de l’homme à la nature qui se retrouve
au centre du film. La nature est un élément qui
ressource, exacerbe nos sens, fait resurgir les instincts primaires,
renvoie l’homme à son état de nature comme pour
le faire revivre.
Pour le personnage
du film, qui est dans un état de réceptivité
extrême puisqu’au seuil de la mort, l’espace dans lequel
il se trouve bouscule ses certitudes et fait tomber son masque.
La nature qui l’entoure le met en face à lui-même,
à son humanité et lui renvoie le miroir de son
âme. C’est ce dont prend conscience le personnage au
fur et à mesure du film, la nature l’amène à
un début d’introspection forcée qui le conduira
à la guérison.
Japon est donc d’abord un film que l’on ressent. Le
cinéaste réussit à mettre en éveil
tous les sens du spectateur, mais comme dans toute œuvre basée
sur la suggestion, les non dits et l’introspection, il faut
prendre le temps de la comprendre, de l’analyser et de s’en
imprégner.
Tout à la fois histoire d’amour, de sexe, de mort,
de religion et de souffrance, Japon unit l’homme à
la nature dans un lyrisme échevelé. Un film
rare qui ose prendre des risques du premier au dernier plan.
Un plan ultime et majestueux qui nous entraîne dans
un long travelling avant d’une voie ferrée pendant
plus de trois minutes. A l’ère de la génération
zapping, tant de sensibilité et d’audace réjouissent.
Titre : Japon Réalisateur
: Carlos Reygadas Scénariste :
Carlos Reygadas Acteurs : Alejandro
Ferretis, Magdalena Flores, Yolanda Villa, Martin
Serrano, Rolando Hernandez, Bernabé Pérez Image : Diego Martinez
Vignatti Son : Gilles Laurent Décors :
Alejandro Reygadas Montage image :
Carlos Serrano Azcona, Daniel Melguizo, David
Torres Montage son : Ramon
Moreira Musique : Arvo
Part, Dimitri Shostakovitch, Jean Sebastien Bach Producteur : Carlos
Reygadas, NoDream Cinema Directeur de production :
Gerardo Tagle. Pays : Espagne,
Mexique Date de sortie : 15
Janvier 2003 Durée : 2 h 02
mn Année :
2001