Une émotion, voire une certaine
mélancolie heureusement délestée de toute
la guimauve spielbergienne habituelle, qui réussissent
à percer malgré le décorum et la légèreté
apparente du film. Si la fuite en avant d’Abagnale constitue
le cœur du récit, Arrête-moi si tu peux
parle avec subtilité et avant tout de la perte d’innocence
et de la difficulté de grandir dans une famille désunie.
Un thème, déjà abordé dans E.T,
qui fait de ce film une œuvre plus personnelle qu’il n’y paraît,
Spielberg ayant lui-même mal vécu la séparation
de ses parents.
La course folle
de Abagnale, qui dénote une immaturité touchante
et un refus obstiné à affronter la réalité,
n’a finalement qu’un but inaccessible : que sa mère
(formidable Nathalie Baye), une bourgeoise égoïste,
et son père (Christopher Walken, pathétique
en loser magnifique) reprennent la vie commune. Un géniteur
un brin filou fasciné par les aventures de son fils,
qui au lieu de l’encourager à arrêter ses escroqueries
préfère vivre sa vie par procuration. Le regard
de Spielberg se fait alors un peu plus amer face à
l’irresponsabilité paternelle.
Paradoxalement,
le seul modèle de stabilité, celui qui compte
bien lui remettre les pieds sur terre, Frank le trouvera
chez son " chasseur ", l’agent du FBI
joué avec sobriété par Tom Hanks. Leur
jeu de cache-cache, brillant, drôle et émouvant,
est un régal. La scène où l’austère
agent Harantty est sur le point de capturer sa proie et
se fait lamentablement rouler dans la farine est un moment
de pure jubilation tant par le rythme, les situations comiques
et le jeu irrésistible des acteurs. Au fil du temps,
même si la méfiance reste longtemps de mise,
leur relation va s’étoffer : Abagnale, de plus
en plus seul, l’appelle toutes les veilles de Noël
et Harantty se met à jouer les protecteurs, presque
au père spirituel, quand il découvre la jeunesse
de Frank. C’est lui encore qui l’aidera à sortir
de cet engrenage et à s’amender. Un aspect prévisible
de la part d’un moraliste comme Spielberg mais qui n’enlève
rien au plaisir général.
Bref, Arrête-moi si tu peux reste une " anomalie "
dans l’œuvre de Spielberg, sinon son chef d’œuvre ultime,
qu’on aimerait voir se répéter plus souvent.
Frank Abagnale : il est devenu un auteur
à succès depuis la publication en
1980 de son autobiographie Catch me if you can,
dont le scénario du film est inspiré.
Il a écrit récemment The Art of
Steal, où il évoque sa " reconversion "
en tant que conseiller – sécurité
auprès des banques.
Titre : Arrête-moi si tu
peux Titre VO : Catch
me if you can Réalisateur :
Steven Spielberg Scénariste :
Jeff Nathanson D'après l’œuvre de :
Frank W. Abagnale Jr., Stan Redding Acteurs : Leonardo
DiCaprio, Tom Hanks, Christopher Walken, Martin
Sheen, Nathalie Baye, Amy Adams, Jennifer Garner,
James Brolin, Brian Howe, Frank John Hughes, Ellen
Pompeo Compositeur : John
Williams Directeur de la photographie :
Janusz Kaminski Costumier : Mary
Zophres Chef décorateur :
Jeanine Oppewall Coproducteur :
Devorah Moos-Hankin Chef monteur :
Michael Kahn Producteur : Walter
Parkes, Steven Spielberg Producteur exécutif :
Barry Kemp, Michel Shane, Anthony Romano, Laurie
MacDonald, Daniel Lupi Production : DreamWorks
Pictures, U.S.A. Distribution :
United International Pictures (U.I.P.) Date de sortie : 12
Février 2003 Durée : 2 h 21
mn Année :
2002 Pays : USA