Pour renforcer la
portée métaphysique de son histoire, Soderbergh
reprend les thèmes centraux développés
dans le livre, les déplace et en crée de nouveaux,
en lien avec la relation amoureuse.
Tout d’abord, le cinéaste
reprend le thème de l’incommunicabilité avec
l’Autre, représenté par la planète Solaris,
et le déplace dans le cadre de la relation de couple.
Ainsi on perçoit plus clairement la thématique
centrale (énoncée dans le film par Gibarian
sur un écran vidéo) : à savoir que
nous ne sommes pas à la recherche d’autres mondes mais
à la recherche de miroirs.
Non seulement, Chris comme Gordon se rend compte de son impossibilité
à communiquer avec l’Océan, mais surtout que
lui-même n’arrivait pas à communiquer avec la
femme qu’il avait aimée. Solaris lui redonne cette
possibilité.
Puis, Soderbergh reprend le thème du sentiment de culpabilité
en le poussant à l’extrême (la récurrence
des scènes sur Terre l’accentue) et en le plaçant
en tout premier plan tandis que Lem et Tarkovski le plaçaient
au second plan. Le héros soderberghien éprouve
beaucoup plus de remords et de souffrance que le Kelvin de
Tarkovski même si le désir très fort de
pouvoir à nouveau aimer cette femme se retrouve chez
les deux personnages.
Et enfin, Soderbergh se positionne sur la question de la mémoire.
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Lem a axé sa
pensée autour de l’identité humaine, mise en
question par les " visiteurs " générés
par Solaris, et s’est interrogé aussi sur la question
de la mémoire. Mais il n’a fait qu’effleurer cette
thématique sous jacente. Soderbergh reprend cette problématique
de la mémoire et va plus loin dans la réflexion,
en s’interrogeant sur ce dont on se souvient de l’être
aimé décédé, et sur la façon
dont le souvenir continue d’être vivant dans la mémoire
de celui qui reste.
Mais au-delà de ces trois thématiques, le cinéaste
américain développe un nouveau thème
qui constitue une des thématiques principales du récit :
celui de la prédestination. Il introduit la notion
de fatalité à travers la seconde chance qu’offre
la planète Solaris à Chris qui se traduit par
l’apparition de Rheya. Lorsque la planète lui donne
cette nouvelle chance, le personnage doit accepter de se mettre
en danger, pour voir s’il retombera dans les mêmes erreurs.
À travers la mise à l’épreuve existentielle
du personnage principal, le cinéaste nous pose la question :
sommes-nous destinés à reproduire nos erreurs
à l’infini ? Et peut-on revivre notre passé
différemment ?
Une problématique guidée tout au long du film
par les propos de Gibarian, un des personnages clés
du film qui dit : " Il n’y a pas de réponses,
il n’y a que des choix ". Le choix de Chris
se soldera tout comme pour le Kris de Tarkovski par un enfermement
dans sa propre mémoire.
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