POINT DE VUE
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« It’s Just Buisness »,
la réplique cinglante du Kingpin à Daredevil illustre à merveille
la stratégie mercantile de Marvel Comics & Productions,
rachetée en 1986 par New World entertainment. Marvel Comics
s’est muée en une entreprise commerciale mainstream
où la notion d’auteur n’est pas toujours la préoccupation
première. Ainsi, si les comics-book se multiplient et si les
sorties augmentent, les dessinateurs et scénaristes eux changent
au fil des mois, l’aspect artistique est devenu secondaire.
La branche cinéma de Marvel, dont Stan Lee s’occupe, a de
nombreux projets en chantiers, Hulk, Ghost Rider. La tentative
la plus marquante a été Spiderman de Sam Raimi, film
d’auteur à gros budget qui est une réussite.
Daredevil a de quoi ravir les fans, ponctué de nombreux
clins d’œils avec les apparitions en guest-star de Frank Miller,
Stan Lee, Kevin Smith. Les dessinateurs Romita, Quesada, Miller,
qui ont fait les beaux jours du comics, sont quant à eux cités.
Le film comporte de magnifiques scènes, notamment la rencontre
entre Matt Murdock et Elektra, mais aussi un passage émouvant
où Murdock grâce, à la pluie, distingue pour la première fois
le visage de sa bien aimée. En outre la scène finale du combat
entre Daredevil et le Kingpin est splendide et menée de main
de maître. Les prestations de Ben Affleck et Jennifer Garner
sont réussis tandis que d’excellents seconds rôles rythment
le long métrage. On notera la prestation de Joe Pantoliano
(Ralph Cifaretto dans Les Sopranos) interprétant le
journaliste Ben Urich.
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Daredevil, personnage complexe, noir,
aurait pu être la rencontre entre un bon film et un
personnage marquant : malheureusement, ce blockbuster, s’il
est un divertissement de bonne facture n’est qu’une banale
œuvre commerciale creuse. L’énorme défaut du film repose
sur le fait que Mark Steven Johnson va trop vite. En 1h42
(montre en main), il nous raconte l’acquisition des pouvoirs
de Daredevil, la mort de son père, sa rencontre avec Elektra,
sa lutte contre Bullseye et le Kingpin. S’il réussit ce
tour de force scénaristique, l’œuvre dans son entier s’en
trouve déséquilibrée, les rencontres, les combats se succèdent
sans engendrer la moindre émotion ni profondeur. Le scénario,
inexistant, qui tente en vain de raconter plus de 40 ans
d’aventures de l’homme sans peur est tout de même subordonné
à une mise en scène acceptable. Toutefois, les personnages
principaux qui dans Daredevil sont complexes ne sont
réduits ici qu’à une galerie d’archétypes qui participent
au « spectacle ». Avec ce film qui est un raccourci
simpliste du comics, Daredevil est un héros sans relief.
Le spectateur n’est pas affecté par les mésaventures de
DD et n’a alors pas peur de ce qui peut arriver.