Après le succès de La vie est belle
(1997), Benigni savait qu’il aurait les moyens de financer Pinocchio
et qu’il s’agirait peut-être même de sa seule chance de réaliser
sans contrainte sa vision du conte. Un conte italien dont Benigni
se sent très proche : « Pinocchio est une histoire
cruelle, comme toutes les histoires sur l'humanité, elle fait
pleurer, elle n'est pas triste mais cruelle, elle n'est pas
mélancolique mais bouleversante, sans le vouloir véritablement.
C'est une histoire qui réveille nos craintes d'enfant ! »
On retrouve un peu tout ça dans le film quand la baleine
dans la nuit avale Pinocchio d’un coup. Une séquence assez noire
nuançant les scènes franchement guimauves du film.
Quand on sait que Roberto Benigni
est né en Toscane à quelques kilomètres à peine où est né
Pinocchio ; quand on voit ses clins d'oeil impertinents
au Mentor, au grand menteur ; et tout cet amour à la
vérité de la Toscane, à la démence et aux possibles de l’enfance,
difficile de rester indifférent à Pinocchio de Benigni. Du
burlesque italien, théâtral et populaire, aux tragédies
quotidiennes, Benigni signe un film à gros budget, mais
personnel et paradoxalement mature, indépendant. Adresses
et maladresses d’un des derniers clowns (revendiqués comme
tels !) de notre temps. Un clown sorti de la terre
nous invitant plus que jamais à faire l’école buissonnière,
à suivre notre ombre espiègle, et à nous écouter être enthousiaste,
à nous écouter être plus humain, à nous écouter… être,
tout simplement.