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The Sea (c) D.R. THE SEA
de Balatasar Kormákur
Par Matthieu CHEREAU


SYNOPSIS : Agust a quitté l’Islande pour suivre ses études de gestion à Paris, qu’il a rapidement abandonné pour se consacrer à sa passion : la musique.

À la demande de son père, il accepte de revenir après plusieurs années dans son pays natal, bien qu’il redoute de l’affronter, car il n’a jamais trouvé le courage de lui avouer la vérité.

Accompagné de Françoise, sa fiancée française, il débarque dans un village coincé entre la mer et les fjords, éloigné de tout et replié sur lui-même.

Thordur, son père, propriétaire redouté d’une conserverie de poissons menacée par la politique de nouveaux quotas de pêche, refuse de voir le monde qui change autour de lui.

Le fils aîné de ce dernier, l’actuel directeur de l’usine, lui conseille de vendre celle-ci avant qu’il ne soit trop tard. Ce que refuse obstinément Thordur qui souhaite qu’Agust reprenne l’affaire.

Lors d’une soirée où toute la famille est réunie pour parler de l’avenir, les jalousies vont se révéler, les rancœurs se dévoiler et les passions s’embraser. Entre humour, cynisme et détresse, les vérités vont surgir. S’ensuivra une nuit de folie, où l’absurde et le tragique gagneront progressivement le village tout entier, renversant définitivement l’ordre tacite que l’on croyait établi.

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POINT DE VUE

Après s’être attaché à dépeindre les pathétiques frasques d’un jeune désoeuvré dans 101 Reykjavik, Kormákur s’éloigne de la capitale sans pour autant renoncer à filmer la brutale transformation de la société islandaise.

  101 Reykjavik (c) D.R.
Le film débute abruptement par le départ précipité d’un jeune homme et de son amie française pour l’Islande. Là-bas, sa famille l’attend : son frère hésitant et faible, sa belle sœur hystérique et têtue, sa sœur frustrée et traumatisée, son neveu silencieux et débile – tout ce joli monde s’apprête à se retrouver, convoqué par le père de famille pour une raison encore mystérieuse. Le décor est posé, et les ingrédients présents pour un film détonnant.

Car en réalité, c’est bien le propos de ce film, de détonner, d’opposer violemment deux générations, deux cultures, qui accusent ce que l’autre espère. The Sea est somme toute assez proche de ces films scandinaves qui s’attachent à filmer la dissonance à l’œuvre entre des traditions issues du passé (souvent celles du silence) et un présent qui cherche à s’affranchir (notamment par la révélation). Festen compte parmi les films les plus célèbres de ce genre. The Sea joue sur les mêmes ressorts de la révélation et du scandale pour montrer du doigt une micro-société isolée de tout (le village où se déroule l’histoire est à dix heures de route de Reykjavik), profondément marquée par le passé (reposant sur l’industrie du poisson, elle en porte encore l’insupportable odeur), qui va à la dérive vers sa disparition. Les hommes, peu à peu, quittent en effet le navire. The Sea est la singulière chronique de cette désertion.