Singulière, car elle étonne par sa
violence et, il faut bien le dire - pour nous continentaux
- par son exotisme. Elle parvient, en passant de la violence
symbolique à la violence réelle, à monter que le futur, pour
advenir dans une société aussi archaïque que celle-ci, s’accouche
dans la souffrance. Comme si le scandale était nécessaire
et sa représentation bienvenue, pour expurger ce que ce pays
a sur le cœur. Le cinéma social : des images sur la société,
pour la société.
Lorsque le navire a sombré et que l’homme a disparu, seul
le paysage demeure - superbe et terrifiant. Il est l’espace
à la fois spectateur (lui seul demeure inchangé) et acteur,
celui vers lequel les personnages se tournent dans la crise
qu’ils traversent. Il est le lieu de l’abandon, de la perte
de soi au sens propre comme au sens figuré. Les montagnes
enneigées, les fjords noirs, tout fait de ce décor baroque
le théâtre d’une tragédie où les hommes voient dans l’immensité
leur délivrance, qu’elle prenne la forme d’un déchaînement
ultime, d’une errance passagère, ou de la mort. Le paysage
ici est la clé de voûte de l’intrigue, le personnage immuable
d’une comédie qu’il impose aux hommes, comme une condamnation.