SYNOPSIS :
En juin 1940, à l'hôtel Splendid de Bordeaux sont réunis ministres, journalistes,
grands bourgeois, demi-mondaines et espions de tous bords. Là,
un jeune homme devra choisir entre une célèbre actrice et une
étudiante passionnée, entre les politiques et les voyous, entre
l'insouciance et l'âge adulte.
Il y a au moins deux films dans Bon
Voyage, le dernier opus « en mouvement » de Jean-Paul
Rappeneau. Le premier, c’est celui dont tout le monde parle.
Celui qui s’habille de stars et de figurants en bataille, la
superproduction enjouée et bondissante.
Eté 1940, seconde guerre mondiale, les Allemands envahissent
Paris. Ministres, bourgeois, journalistes, espions, intrigants
en tout genre, fuient à Bordeaux. Certains envisagent de partir
pour l’Angleterre organiser la Résistance, d’autres pensent
déjà collaborer avec l’ennemi. Sur cette toile de fond mouvante,
Frédéric (Grégori Dérangère), jeune écrivain, est accusé d’un
meurtre qu’il n’a pas commis, avant d’être pris entre deux femmes
aussi opposées l’une que l’autre. Viviane, actrice connue, femme-miroir
attirant les regards, a mis dans l’embarras celui qui l’aimait
alors qu’elle n’était encore qu’une inconnue. Prise dans ses
mensonges et ses contradictions, elle met « de l’art dans
sa vie », virevolte, séduit, s’effondre avant de repartir
de plus belle. Isabelle Adjani l’interprète avec un allant qui
rappelle l’entrain hallucinant dont faisait preuve Rosalind
Russell dans La dame du vendredi, le film « à toute
vitesse » de Howard Hawks. Rencontrée dans un train, Camille
est une étudiante romantique et posée, très volontaire, qui
sera l’un des protagonistes moteurs de la deuxième partie du
film.
Bon voyage déploie avec bonheur
son récit dense. Pendant près de deux heures, vont se croiser
un ministre véreux (Gérard Depardieu), un espion allemand
dissimulé sous les oripeaux d’un journaliste anglo-saxon (Peter
Coyote), un voyou grande gueule (Yvan Attal), un savant transportant
de mystérieux fûts d’eau lourde convoitée par les nazis et
bien d’autres personnages, tant le cinéaste met toujours en
valeur les rôles secondaires (on citera notamment Edith Scob
et Michel Vuillermoz). On aime aussi sa manière discrète mais
déterminée de faire toujours sentir la réalité historique
de l’époque qu’il filme, à l’instar de ce panoramique bouleversant,
terminant un plan sur l’image d’une femme et de son enfant,
réfugiés. Bon voyage, c’est aussi la « jubilation
Rappeneau », qui fait se mouvoir les êtres, les foules
et les feuilles (celles qui animent le plan vide de la cuisine
de la prison au début du film comme celles du roman de Frédéric
s’envolant sur la plage).
Le film débute et se termine dans une salle de cinéma, le
temps pour Viviane de mettre cette fois-ci « de la vie
dans son art », en quittant la réalité pour le grand
écran. Le temps pour les personnages de faire leur mue, de
gagner quelques traits d’adulte et de continuer leur vie hors
écran. Lorsqu’on se prend à imaginer le destin des personnages
d’un film que l’on vient de voir, c’est que nous nous sommes
attachés à eux. Le pari de Bon voyage est donc d’autant
plus gagné qu’il existait toujours le risque de voir les différents
protagonistes englués dans une mécanique empesée et figée,
réduits à l’état de pantins.