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De la mine des westerns au lit à barreaux
façon Baby Doll, que Grace installe chez elle, Lars
Von Trier fait rejouer les trente glorieuses du cinéma américain
en leur empruntant ses idoles et son style (l'apparition de
Nicole Kidman qui surgit du néant vers la lumière, comme aux
pleines heures du star-system, le thème musical, qui connaissait
alors ses heures de gloire, la course à l'adaptation et le
pillage de la littérature, poussé ici à son extrême dans l'utilisation
des chapitres et de la voix off).
Et sous nos yeux, l'habit de lumière, comme la robe de Grace,
se réduit peu à peu comme une peau de chagrin.
Dès lors, le choix du nom de Thomas Edison, le pionnier du
trust cinématographique, ainsi que la boutique aux
sept figurines dans la vitrine (qui finissent par être réduites
à 5 : les Big five ? ) , qui détient à elle
seule le monopole des achats, n'est peut être pas dû à un
hasard.
De même, le choix de la période de la Dépression (période
de chaos où c'est tout le fondement de la société américaine,
le capitalisme, qui est menacé) bien plus qu'un contexte,
offre également une note tristement prophétique.
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Comme Jenny-la-pirate de l’Opéra de quat'sous
(dont est inspiré le personnage et l'histoire), Lars s'amuse
en attendant la catharsis finale et expéditive, et comme elle,
tout comme Grace, chantonne malicieusement: « Vous
ne savez toujours pas qui je suis… »
Il est peut-être ce petit garçon impatient de recevoir
des coups de pieds aux fesses, écoeuré de la tendresse de
sa mère (ou du pathos dégoulinant des comédies romantiques
made in USA !).
Il est Tom, ce faux metteur en scène pétri de bonnes intentions.
Il est enfin et surtout Grace, finalement coupable d'avoir
voulu " voir plus loin que chez elle " (les journalistes
américains ont reproché à Lars Von Trier de n'être jamais
allé aux Etats-Unis), et métaphore du film exigeant refusé
par les grands studios (parce qu'il représente trop de risques),
puis finalement vainqueur.
Lars Von Trier est l'épine dans le pied du cinéma qui ne réfléchit
plus que sa propre image, opium des peuples. Il est celui,
assez gonflé, qui a signé un film américain au concept marxiste,
c'est-à-dire un film qui exhorte à se libérer d'un système
que plus personne n'osait remettre en cause.
Le cinéma de Lars Von Trier, en poussant toujours plus loin
l'expérience formelle, et en demandant au spectateur de s'investir,
construit le cinéma de demain d'une Europe qui pourrait bien
devenir à son tour le « Nouveau monde ».
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Titre :
Dogville
Réalisateur :
Lars von Trier
Scénariste :
Lars von Trier
Acteurs : Nicole Kidman,
Stellan Skarsgard, Paul Bettany, Philippe Baker
Hall, Patricia Clarkson, Jeremy Davies, Siobhan
Fallon, Ben Gazzara, Chloë Sevigny, Lauren Bacall,
Zeljko Ivanek
Photo : Anthony Dod
Mantle
Production : Peter
Aalbk Jensen
Distribution : Les
Films du Losange
Interdit aux moins de :
12 ans
Sortie le : 21 mai 2003
Durée : 2h 47 mn
Année : 2003
Pays : Danemark
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