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Otomo (c) D.R.

Le réalisme social est donc omniprésent, mais ce n'est rien à voir avec une sorte de naturalisme plombant qui démontre au lieu de montrer. Frieder Schlach évite toute forme caricature plus ou moins gauchisante. En préférer rester dans le silence que dans l'excès de dialogues, il rend crédible son point de vue. Otomo n'est pas victimisé. Le misérabilisme bon teint sur les pauvres présentés comme des héros avilis par le système n'existe pas ici. En fait, on ne sait pas qui est vraiment cet Otomo. Un homme violent qui n'a pas grand respect pour la vie d'autrui, un individu entraîné dans une spirale infernale... Finalement, Frieder Schlach laisse le champ libre à toutes les interprétations. Il nous guide vers la deuxième explication, mais son héros de fiction conserve sa part de mystère, celle que contient aussi cet homme bien réel décédé un jour d'août 1989 dans un bain de sang difficilement compréhensible.

Frieder Schlach ne se pose pas en juge, en donneur de leçons politiques ou sociales, il fait juste valoir sa subjectivité par rapport à un évènement donné. Et c'est là la grande force de ce film, comme c'était le principal atout du film de Laurent Cantet, L'Emploi du temps, d'ailleurs dans une démarche cinématographique assez proche. D'autre part, la réussite d'Otomo tient aussi beaucoup dans la prestation d'Isaach de Bankolé. Sorte d'acteur errant qu'on a vu beaucoup chez Claire Denis et un peu ailleurs, même aux États-Unis, ce comédien s'est construit un parcours atypique, rendu difficile par une personnalité hors norme et une couleur de peau qui réduit intrinsèquement le nombre de rôles disponibles. Du moins en Europe, là où il a essayé de percer au début de sa carrière.

  Otomo (c) D.R.

Dans Otomo, Isaach de Bankolé n'interprète pas, il est. Il est cet immigré africain perdu, suicidaire (la scène du métro où il se place un couteau sous la gorge). Il joue de sa stature, de son physique impressionnant pour faire de son personnage une présence qui parle peu, qui agit un tout petit plus sans tomber loin de là dans des crises d'hyperactivité, mais qui imprime l'écran d'une trace indélébile. D'ailleurs, quand l'acteur n'est plus dans le plan, en particulier dans les scènes centrées sur les policiers, l'intérêt baisse soudainement. Comme si aucun personnage n'arrivait à émerger face à celui d'Otomo parce que c'est lui qui contient le substrat de l'histoire.

En résumé, avec humilité, évoquant un fait divers sans tomber dans le voyeurisme, dressant un constat de la situation des immigrés en Allemagne sans apporter de réponses toutes faites, en construisant une histoire touchante sur un homme perdant son humanité aux yeux du monde pour cause de trop grande pauvreté et de trop visible négritude, Frieder Schlach montre le meilleur visage du cinéma social.



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Titre
: Otomo
Réalisateur : Frieder Schlaich
Acteurs : Isaach de Bankolé, Eva Mattes, Hanno Friedrich, Barnaby Metschurat
Festival : Etoile de cristal au Festival international du film de Bruxelles 2000, Tiger Award au Festival de Rotterdam 2000 et le Diversity in Spirit Award au Festival de Vancouver 2000
Année : 1999
Durée : 1h 25mn