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L’Iran est un pays marqué par de
nombreux bouleversements politiques dont la guerre d’Irak
et la révolution islamique sont les exemples les plus frappants.
Pendant 30 ans, le pays n’a cessé d’être tiraillé entre
plusieurs idéologies. Depuis la mort de Khomeyni en 1989,
deux tendances s’affrontent avec d’une part celle du clergé
conservateur exerçant son influence sur le Parlement et
d’autre part celle du président réélu en 1993, favorable
à des réformes économiques, qui, toutefois ne remettent
pas en cause la finalité d’un régime tout entier fondé sur
la loi islamique. Sang et or illustre cela. Hussein
est désireux de reconnaissance sociale, il veut gagner de
l’argent, en quelques sorte « s’occidentaliser »
mais rencontre une société encore figée.
Le film déroule alors les petites scènes du quotidien. On
voit Hussein se faire refouler la première fois par le bijoutier
car il n’est pas habillé correctement tandis que la seconde
fois habillé en costume cravate il pourra enfin y entrer.
A l’intérieur, on verra Hussein littéralement envoûté par
les bijoux qu’il contemple mais qui lui restent hélas inaccessibles.
Il en va de même lorsque sur la fin Hussein est gentiment
invité par un riche homme qui avait commandé des pizzas.
Une fois entré Hussein est comme fasciné par tout ce luxe.
L’appartement est grand, il le visite et s’y perd presque,
à l’image de son corps tombant lourdement dans l’eau de
la piscine comme si c’était la conséquence d’un étourdissement
trop fort provoqué par la visite des lieux. Sans jamais
imposer un quelconque discours didactique qui serait mal
venu, Panahi nous fait comprendre ce qui a poussé Hussein
à passer à l’acte.
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Dans le même temps donc, le metteur
en scène iranien montre les stagnations de la société dans
laquelle il vit. La scène la plus éloquente à cet égard
est la suivante : Hussein parvient à entrer dans la
bijouterie accompagnée d’une demoiselle qui est censée être
sa femme ; elle essaie des colliers et des boucles
d’oreilles. Pour savoir si cela lui va bien, elle découvre
son voile pour le monter à Hussein. A la sortie de la bijouterie,
Hussein est comme pris d’un malaise. La femme s’imagine
alors que c’est parce qu’elle s’est découverte. Panahi montre
ainsi l’écart qui existe entre d’un côté une sorte d’enrichissement
lié à une certaine forme de libéralisation et de l’autre,
la permanence des règles et des normes sous-jacentes qui
seraient plutôt à mettre du côté des sociétés dites traditionnelles.
Inadaptation, incapacité à conjuguer réformes avec certains
us et coutumes, Hussein est le produit d’une société en
mutations, avide de mobilité sociale mais assigné à sa place
par une société qui ne lui laisse guère sa chance. C’est
ainsi que le film s’achève sur la scène initiale, le braquage.
Le corps de Hussein, à contre-jour, se dessine dans l’entrée
de la bijouterie. Il n’en reste qu’une forme obscure indistincte
débarrassée de toute identité. Chronique d’un drame annoncé
dont la forme circulaire du film semble dire que Hussein
ne sera peut-être pas le dernier à commettre ce genre d’acte.
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Titre VO :
Talaye sorkh
Réalisateur
: Jafar Panahi
Scénariste
: Abbas Kiarostami
Producteur
: Jafar Panahi
Production
: Jafar Panahi Film Production
Distribution
: Celluloïd Dreams
Acteurs
: Hossain Emadeddin Kamyar Sheisi Azita Rayeji
Shahram Vaziri
Compositeur
: Peyman Yazdanian
Directeur de la photographie
: Hossain Jafarian
Chef monteur :
Jafar Panahi
Date de sortie
: 25 Février 2004
Durée
: 1h 37mn
Année
: 2003
Pays
: Iran
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