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Les films venant des pays concernés
sont bien différents. No man's land de Danis Tanovic
a le premier séduit le public international. Le changement
d'angle se remarque dès le choix des deux personnages principaux
l'un est un soldat serbe, l'autre un soldat croate. Du coup,
l'Ex-Yougoslavie n'était plus qu'une simple toile de fond,
mais le centre du film. De la proximité forcée - ils sont
coincés entre les deux lignes de front - entre les deux
frères ennemis apparaissent à la fois les raisons du conflit
et son idiotie. Svjedoci est du même tonneau. Le
film de Vinko Bresan met les deux pieds dans le conflit.
En centrant son scénario sur l'assassinat d'un serbe par
des miliciens croates, en développant son récit suivant
les points de vue différents personnages, il tourne autour
de la guerre, sans montrer - à part une séquence - de scènes
de front, mais en se consacrant sur la vie de l'arrière.
La haine entre deux communautés si imbriquées, le sang qui
appelle le sang, tous ces thèmes sont abordés dans Svjedoci.
Comme ils l'étaient déjà dans No man's land. Mais
contrairement à Danis Tanovic, Vinko Bresan le fait sans
aucun humour. L'atmosphère est lourde, pesante, renforcée
par une photographie qui met en avant les couleurs froides.
Cette austérité est peut-être l'une des raisons qui font
que le spectateur reste désespérément en dehors de l'histoire.
Pas de porte de sortie, pas d'évasion, seulement la violence
qui flamboie dans les regards des miliciens, seulement la
triste résignation du policier, seulement la peur viscérale
de la mère de famille. Difficile de rentrer dans un univers
aussi noirissime.
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Même le procédé scénaristique consistant
à suivre l'action selon le regard de tel ou tel personnage
ne fait qu’alourdir le récit. Il aurait pu l'éclairer, mais
la déstructuration scénaristique ne fonctionne que lorsqu’elle
donne un rythme à l'histoire. Et ce n'est pas le cas ici.
D'ailleurs, quelle est l'utilité d'un tel procédé ? Apporte-t-il
quelque chose au film ? Pas vraiment. Se justifie-t-il par
rapport au film ? Pas vraiment non plus. Les acteurs ont
un certain talent, surtout Mirjana Karanovic dans le rôle
de la mère. Le réalisateur bien que d'un style très académique
a quelques jolies envolées. L'idée de parler de notre monde
contemporain plutôt que de chercher sa thématique dans les
décennies passées est très largement défendable. Mais Svjedoci
fait partie de ces films qui s'enfoncent jusqu'au cou dans
la noirceur et qui laissent du même coup de côté le spectateur
qui refuse de s'y noyer. No Man's Land, avec sa dérision
corrosive, émeut beaucoup plus, arrive à faire passer davantage
d'émotion. Comme quoi le rire jaune ou l'humour noir sont
de très bons porteurs de sens.
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Titre : Svjedoci
Réalisateur :
Vinko Bresan
Scénaristes :
Jurica Pavicic, Vinko Brešan
D'après le roman de
: Jurica Pavicic
Acteurs
: Mirjana Karanovic, Leon Lucev, Alma Prica, Drasen
Kuhn, Kresimir Mikic
Directeur de la photographie :
Givko Zalar
Monteuse :
Sandra Botica Brešan
Producteur :
Ivan Maloca
Production :
hrt, Interfilm produkcija d.o.o.
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