Comment expliquer l'ennui que procure
ce film, le poids sur le système nerveux qui font peser
des scènes d'une inanité suicidogène ? Au début, on espère
vaguement que les choses vont s'arranger, que tout ce rien
va bien aboutir quelque part, et puis il y a l'apparition
de Marthe Keller qui replonge le spectateur dans des souvenirs
cinématographiques des plus agréables. Cependant, la naïveté
a ses limites temporelles. Il arrive un moment où l'espoir
de passer un bon moment de cinéma ne devient plus qu'un
rêve inaccessible. Et la suite du film se transforme alors
en petite souffrance. Quand cette torture par le vide va-t-elle
enfin se terminer ? Quand ces personnages vont-ils enfin
disparaître de notre vue ? Il devient impossible de penser
à autre chose qu'au générique de fin, délivrance promise
qui se fait douloureusement attendre.
Alors, pour passer le temps, on essaie de s'amuser des situations
mises en oeuvre. De ce bébé qui pleure par intermittence,
pour marquer les temps du récit. De cet homme et de cette
femme qui se querellent avec une intensité toute mormonne.
De cet acteur, Frank Giering, qui multiplie les grimaces
canines pour signifier sa cocufiction. De cette actrice,
Anne Ratte-Polle, étrangement belle, certainement intéressante
au théâtre mais qui se retrouve embarquée dans un naufrage
dont elle n'a pas dû percevoir les tenants et les aboutissants
à la signature du contrat. Et, surtout, de ces discussions
interminables sur la relation amoureuse en général et la
rupture en particulier, discussions dont l'amant, Baste,
interprété de manière catastrophique par Sebastian Schiffer,
se fait le porte-drapeau à peine entré en scène.
À cinq minutes du mot fin, ce personnage
répète ainsi sans cesse la même phrase – « Alors
on y va ? » - sous des formes différentes – « On
part ? »,« On s'en va ? »...
- pendant que sa compagne, hésitante, multiplie les digressions
sans queue ni tête. Pour le spectateur, la seule défense
face à ce déluge d'inepties est la moquerie, la distanciation
comique, et l'on se met à rire de ces êtres qui n'ont de
consistance que dans l'esprit aveuglé de prétention de Romuald
Karmarkar, de ces êtres aussi éloignées de l'humain que
peut l'être Jean-Marie Le Pen de la démocratie. Au final,
tout cela pourrait être dérisoire, si seulement tout n'était
fait avec un tel sérieux, une telle certitude de faire dans
le génie pur. Film allemand, Die Nacht singt ihre Lieder
se situe pourtant à des années lumière de la nouvelle vague
de cinéastes germaniques qui enchantent depuis quelques
mois les festivals du monde entier. Le travail de Romuald
Karmarkar fait plutôt penser à ce que l'auteurisme européen
a pu commettre de pire en matière de Septième Art.
Titre
: Die Nacht singt ihre Lieder Réalisateur
: Romuald Karmakar Scénario
: Romuald Karmakar, Martin Rosefeld D’après la pièce de
: Jon Fosse Directeur de la photographie
: Fred Schuler, A.S.C Montage
: Patricia Rommel Costumes :
Bettina Helmi Maquillage
: Margrit Neufink Son
: Frank Kruse Musique
: Swans, Henry Purcell, Michael Mayer, Captain
Comatose, Chris & Carla, Maximilian Hecker Casting
: Risa Kes Acteurs :
Frank Giering, Anne Ratte-Polle, Manfred Zaptaka,
Marthe Keller, Sebastian Schipper Producteur :
Roland Karmakar Producteurs exécutifs
: Harald Will (Pantera Film), Udo Happel (Studio
Babelsberg Motion Pictures), Ernst Ludwig Ganzert
(Eikon Media) Producteurs associés
: Mathias Schwerbrock (Cronaca Film) Prodcution
: Pantera Film Co-production
: Studios Babelsberg Motion Pictures, Babelsberg
Film, ZDF En association avec
: Arte, Eikon Media, Cronaca Film