Fort
du succès de ces petits films au héros si atypique, le cinéaste
lance son premier long métrage et réussit un vrai exploit :
créer un film d’animation argentin indépendant avec seulement
200 000 euros de budget.
Malgré une introduction laborieuse pendant les premières minutes,
le film démarre ensuite en trombe à un rythme qui devient
de plus en plus frénétique. Avec un style minimaliste et un
graphisme qui oscille entre la BD, le manga et le cartoon
on sent que ce n’est pas la beauté du trait qui passionne
son réalisateur mais plutôt l’envie de croquer le portrait
de personnages truculents et délivrer des messages éthiques
et politiques. Un cinéaste engagé comme on en voit peu dans
le cinéma d’animation et qui n’hésite pas à faire exploser
le politiquement correct des productions argentines actuelles.
Tout d’abord, Juan Antin utilise un extraterrestre afin de
mieux rendre compte de l’absurdité du monde en prenant un
point de vue très éloigné. Mercano se pose ainsi en juge de
notre société terrienne qui se présente comme un monde sans
pitié au sein duquel Internet est roi et domine les techniques
de communication traditionnelles.
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Juan
Antin fustige sans ménagement les méfaits de la mondialisation
à travers l’invasion technologique des foyers, l’inégalité
qui se creuse entre riches et pauvres, la corruption et l’incompétence
des autorités, la société de consommation qui crée de nouveaux
besoins et pousse à consommer toujours plus, le désenchantement
des jeunes qui ne pensent qu’à quitter leur pays dans l’espoir
d’un avenir meilleur…
Pour autant, Mercano le martien n’est pas un
film sombre mais une comédie subversive et burlesque qui fait
souffler un vrai vent de liberté. Principalement, parce qu’il
n’a pas eu à subir de délocalisation pour sa fabrication (qui
est une vraie entrave à un vrai regard d’auteur sur un long
métrage d’animation) et aussi par la relative indépendance
de son financement.
Aborder des thématiques si violentes et polémiques dans un
film d’animation même aujourd’hui reste très rare. Ce dernier
est encore trop cantonné aux sujets conventionnels pouvant
toucher un public large si possible familial sans références
culturelles à cause de l’exploitation sur le marché mondial.
(valable surtout pour les séries TV) Une internationalisation
des produits culturels qui tend à un risque d’uniformisation
des œuvres auquel échappe avec bonheur Juan Antin.
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