Quand on me pose la question
" de tous vos films, quel est celui que vous préférez
? " , je suis incapable de répondre.
Par contre, je sais très bien quelles sont, dans mes
films, les scènes que j’aime et que je préfère.
Il en est une que j’affectionne
tout particulièrement. C’est celle, dans Travelling
Avant, où Donald-Simon de la Brosse, avant de faire
l’amour avec Barbara-Ann Gisel Glass, lui confie en préliminaire
: " tu sais, pour que je puisse aimer une fille,
que je la prenne dans mes bras, j’ai besoin de m’imaginer
que je suis un héros... ".
C’est sa fragilité
qui rendait Simon de la Brosse sublime et bouleversant dans
le rôle de Donald. Il faut en effet infiniment de fragilité
pour dire avec talent " je ne peux pas rester
en place. Je suis un homme d’action. Je veux être un
homme d’action ". Ou encore : " N’oublie
pas, entre nous, tout est différent, rien comme les
autres. N’oublie pas : je ne suis pas n’importe qui ! "
Trente-trois comédiens
et comédiennes, choisis et repérés par
Gigi, ma femme, participèrent aux finales des essais
pour les trois rôles principaux de Travelling Avant.
Sept d’entre eux concouraient pour le rôle de Donald.
Chacun devait interpréter devant la caméra vidéo
cinq scènes du scénario, (condensées
en trois, pour ne pas morceler le jeu des acteurs). L’une
d’elles était la scène d’avant l’amour. En voyant
jouer Simon pendant les essais, j’imaginais déjà
tout ce que sa sensibilité allait apporter au film.
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On travailla beaucoup, mes
acteurs et moi, dans l’hiver 1986-87 qui précéda
le tournage. Ils avaient tous la passion du cinéma
et prenaient plaisir à ce que je les plonge dans l’époque-reine
de la cinéphilie, la fin des années 40. Je leur
en montrais les films les plus représentatifs et aussi
les actualités que l’on projetait alors dans les cinémas.
Chaque fin de semaine, ils venaient chez moi lire les journaux
de l’époque. Je me souviens d’un dimanche où
l’on avait tiré les rois. Simon était heureux
comme un petit garçon.
N’empêche que deux
jours avant de commencer le film il m’a fait une drôle
de peur. Il était apparu, dans mon bureau, à
la production, avec des cheveux couleur carotte ! J’étais
ahuri, je lui dis :
- Pourquoi tu as fait
cela ?
- J’ai pensé que
ça serait bien pour le rôle.
- Mais enfin, Thierry
Frémont est roux. Et toi, tu vas être carotte
!
J’étais d’autant
plus effondré que le coiffeur accouru m’annonça
qu’il fallait deux à trois semaines de lavages et teintures
pour que les cheveux redeviennent normaux.
- J’ai fait une bêtise,
me dit Simon. Mets-moi dehors.
- Je ne veux pas te mettre
dehors. Je veux que ce soit toi qui fasse le film.
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