François Ozon est une énigme à lui-seul.
À l’instar de ses films qui se suivent mais ne se ressemblent
jamais. Ce cinéaste prolifique et atypique en a fait voir de
toutes les couleurs à ses personnages : une mère de famille
qui voit son bébé menacé par la lourde présence d’une étrange
routarde (Regarde la mer) ; une famille qui part
en vrille à cause d’un rat (Sitcom)
; des tueurs punis par un ogre des bois pervers (Les Amants Criminels) ; des jeunes gens qui tombent sous le charme
d’un homme machiavélique et inhumain (Gouttes
d’eau sur pierres brûlantes) ; une femme qui doit faire
face au deuil de son mari (Sous
le sable) ; des femmes de tous âges qui mènent l’enquête
sur un meurtre (Huit Femmes) ; et, enfin, une romancière fascinée par une jolie bimbo
(Swimming Pool). Son
originalité ? Il n’hésite pas à concilier les genres, parfois
même les plus distincts, ni à lier dans une même scène tragique
et grotesque. C’est sûr, cet homme aime les défis. À l’occasion
de la sortie de son Swimming Pool, nageons ensemble dans les
eaux troubles du mystère Ozon.
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Difficile en effet de faire plus prolixe
que François Ozon. Avec une moyenne d’un film par an, l’enfant
terrible du cinéma français continue de tracer son parcours
et de mettre en scène de belles fictions où se croisent des
histoires magnifiques, des personnages ambigus et des ambiances
impeccablement troubles. Avant d’être réalisateur de longs-métrages,
François Ozon est passé par la case « court» et il y
est resté longtemps. Il n’a d’ailleurs jamais caché son engouement
pour les courts-métrages. C’est d’ailleurs dans l’un d’entre
eux qu’il a découvert la lumineuse Ludivine Sagnier, à qui
il proposera par la suite l’un des rôles principaux de Gouttes
d’eau sur pierres brûlantes, un film aussi énigmatique
que son titre.
Parmi tous les nombreux courts qui jalonnent sa filmographie,
il faut quand même retenir l’un de ses plus beaux : La petite mort, l’histoire d’un jeune homme qui
passe son temps à prendre en photo des jeunes hommes qui se
masturbent. Depuis ses débuts, Ozon a toujours aimé les sujets
brûlants comme l’homosexualité, récurrente dans quasiment
tous ses films. A fortiori avec cet argument de base, on redoute
d’emblée un concentré pseudo-provoc’ qui ne va rien raconter
de passionnant. Tout faux : la provocation est ici un vernis
spectaculaire qui masque le véritable sujet du film : un jeune
homme qui n’a jamais réussi à s’aimer ni à accepter son physique,
parce qu’il pense que son père l’a toujours trouvé laid. Son
déséquilibre permanent, ses coups de dépression et ses rapports
compliqués avec la sexualité sont nés de là. Alors que son
père est sur le point de mourir et qu’il s’est brouillé avec
lui quelques années auparavant, l'homme refuse de renouer
les liens malgré l’insistance de sa sœur qui tente d’arranger
les choses. D’une remarquable finesse, ce court-métrage profond
et bouleversant nous rappelle que les choses ne sont jamais
telles qu’elles semblent être et que, pour citer l’un des
personnages de Sitcom
: « Nous manquons
tous beaucoup d’amour mais toutes les preuves d’affection
quelles qu’elles soient sont toujours les bienvenues ».
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