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Le public viendra définitivement vers François
Ozon avec Huit Femmes, son cinquième film (le plus
ambitieux), qui réunit un casting de rêve. Ozon, réalisateur
devenu conventionnel ? Il ne faut pas se fier aux apparences !
La bande-annonce, parfaite, laisse entendre que nous allons
assister à une partie de Cluedo où il va falloir deviner qui
est le coupable. En fait, l’ambition d’Ozon est ailleurs.
Il simule une intrigue policière bien mystérieuse pour bouleverser
les codes du genre et basculer rapidement dans la comédie
musicale («Toi, mon
amour, mon ami, je ne peux vivre sans toi »). On le sait
depuis ses courts, François Ozon a toujours adoré injecter
de la musique dans chacun de ses films afin de renforcer le
climat absurde qui règne sur ses scénarii : le Bang-bang de Sheila dans Une robe en été ; The rythm of the Night de Corona dans Sitcom ; un vieux tube disco de Toni Holiday
dans Gouttes d’eau sur
pierres brûlantes… Ici, Ozon s’en donne à cœur joie et
s’amuse avec les paroles des chansons en adéquation avec le
scénario et les situations que vivent les personnages. Le
résultat est évidemment jouissif, servi par huit comédiennes,
huit suspectes toutes aussi charmantes et vénéneuses les unes
que les autres.
Peu importe la résolution du film, peu importe l’identité
du tueur : on n’est pas là pour cela; et ceux qui s’attendaient
à une enquête policière ont fatalement été déçus. Huit
Femmes, c’est avant tout un magnifique hommage au métier
d’actrice et par extension au cinéma : Danielle Darrieux demeurera
éternellement la Madame De, de Max Ophuls ; Isabelle Huppert a fréquenté les plus grands,
de Michael Haneke à Chabrol en passant par Pialat; Catherine
Deneuve a tourné chez des cinéastes aussi différents que Lars
Von Trier, Roman Polanski et Léos Carax (pour ne citer qu’eux)…
Et pas de doute que Huit femmes se seraient appelées « Neuf
Femmes » si l'inestimable Romy Schneider était encore
parmi nous. François Ozon lui rend d’ailleurs un bel hommage
à travers le personnage rebelle de la domestique jouée par
Emmanuelle Béart, et souligne incidemment aux jeunes générations
de cinéphiles que Romy n’était pas seulement Sissi, l’impératrice,
mais aussi (et surtout) une actrice bouleversante qui n’a
pas eu peur de jouer dans des films très intenses comme Le vieux fusil, César et Rosalie ou encore L’important,
c’est d’aimer (de Zulawski). Outre les clins d’œil au
cinéma de Truffaut (lors de la confrontation Ardant-Deneuve)
et aux films noirs de la grande époque (Laura
; Gilda…), la
scène finale de Huit Femmes symbolise la transmission du
métier. Toutes les actrices dansent les unes avec les autres,
tandis que Danielle Darrieux assène à Ludivine Sagnier
« qu’il n’y a pas d’amour d’heureux ». Comme si l’ancienne
génération parlait à la nouvelle.
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Huit femmes est donc un cri d’amour pour le cinéma avant d’être un
film. Une œuvre dont le sérieux et la gravité sont cependant
évacués par la drôlerie des dialogues («Je
suis belle et riche alors que ta tante est laide et pauvre»),
des plans subliminaux (le «Je
suis la coupable» écrit sur un livre judicieusement placé
à l’envers) et de folles situations comme lorsque Danielle
Darrieux retrouve l’usage de ses jambes alors qu’on la pensait
handicapée («C’est le
miracle de Noël !»). Après un tel film, Ozon aurait pu
prendre une pause bien méritée, mais il n’en est strictement
rien. Le réalisateur est désormais sur nos écrans avec le
mystérieux Swimming
Pool - qui semble marquer le retour du cinéaste pour les
oeuvres plus intimistes -, dans lequel Sarah Morton (Charlotte
Rampling), auteur anglais de polars à succès, venue se reposer
et travailler dans la maison de son éditeur, voit sa quiétude
perturbée par Julie (Ludivine Sagnier), la fille de ce dernier.
Aujourd’hui, Ozon monte les marches de Cannes avec le solide
espoir de décrocher un prix, histoire de ne pas repartir bredouille
encore une fois. Avec, pourquoi pas, une Palme ?
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2003 5 x 2
avec Valeria Bruni-Tedeschi, Stéphane Freiss
2002
Swimming-pool avec Charlotte Rampling, Ludivine
Sagnier
2001
Huit femmes avec Catherine Deneuve, Isabelle
Huppert
2000
Sous le sable avec Charlotte Rampling, Bruno
Crémer
1999
Gouttes d'eau sur pierres brûlantes avec
Bernard Giraudeau
1998
Les Amants criminels avec Natacha Régnier,
Jérémie Renier
1998
Sitcom avec Evelyne Dandry, Francois Marthouret
1998
X2000
1997
Regarde la mer
1995
Scènes de lit
1995
Une robe d'été avec Sebastien Blanc, Frédéric
Mangenot
1994
Action vérité avec Fabien Billet, Adrien Pastor
1994
La Petite mort
1993
Une rose entre nous
1992
Victor
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