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Désormais, Stefano Cassetti sait
donc ce qu’il veut. Il affirme n’avoir pas de plan de carrière,
mais il ne veut plus être une marionnette docile :
« Après cinq films, je sais maintenant ce que ça
veut dire d’être un acteur. Pendant Roberto Succo, je découvrais
chaque jour une nouvelle facette de ce métier. Je ne pouvais
pas faire autre chose que suivre les indications du réalisateur.
Aujourd’hui, c’est différent, je peux donner mon point de
vue, faire des propositions sur le rôle. » Cette plus
grande confiance en lui, en son talent, il l’exerce notamment
dans la sélection des scénarios qui lui sont proposés. « Je
préfère les histoires noires aux comédies, c’est plus mon
univers, et puis j’aime mieux participer à des films à petit
budget où l’ambiance de tournage est vraiment chaleureuse
et où ma présence au générique peut apporter un petit plus
pour trouver des financements ou pour diffuser le film. »
Car il conçoit le cinéma comme une forme d’engagement, les
films en tout cas ceux qu’il a envie de faire - ou auxquels
aurait aimé participer comme le Fight Club de David
Fincher - doivent avoir une « nécessité sociale ».
Surtout dans le contexte politique actuel.
Stefano Cassetti n’est pas un nouveau Nanni Moretti. Même
s’il s’est déjà rendu à certaines manifestations organisées
par les anti-Berlusconi, il est bien trop pudique pour devenir
un porte-parole de la contestation. Il faut voir par exemple
comme le fait de le prendre en photos le terrorise pour
comprendre combien toute forme d’exhibitionnisme qu’il soit
militant ou mercantile lui est étrangère. Mais sa mise en
retrait naturelle ne l’empêche pas de tenir des propos très
durs envers le Président du Conseil Italien : « On
n’a jamais vu un gouvernement pareil en Italie. Berlusconi
nous ferait presque regretter la démocratie chrétienne et
sa corruption ! » Avant de citer en exemple le
cas du cinéma transalpin : « Personne n’en
parle dans la presse italienne, parce qu’il y a des réformes
encore plus graves prévues pour la justice ou pour les retraites,
mais Berlusconi veut faire passer une loi qui va bouleverser
totalement le mode de financement des films italiens. Les
critères seront corrigés de telle sorte que la quantité
primera sur la qualité, que les grosses productions seront
privilégiées aux dépens des films à petit budget. Cela
risque de détruire le cinéma en Italie alors qu’il commençait
tout juste à renaître. »
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L’avenir est donc incertain. Pour
le cinéma italien, comme pour lui d’ailleurs. Il n’a signé
pour aucun film. Il voudrait essayer le théâtre pour se
lancer un nouveau défi. Peut-être en France où quelques
metteurs en scène l'ont approché, intéressés qu'ils sont
par son travail. Il aimerait aussi jouer en anglais :
« Ce sera plus difficile côté technique parce qu’il
me faudra maîtriser une langue que je connais mal, mais
à mon avis ce sera plus facile pour devenir réellement quelqu’un
d’autre. Parce qu’en français ou en italien ma véritable
personnalité empiète toujours un peu sur le personnage. »
Mais quelle que soit la voie qu’il choisisse, qu’elle le
mène au succès ou à l’échec, Stefano Cassetti restera sûrement
le même homme. Celui qui retourne à son métier d’architecte
d’intérieur free lance quand le téléphone ne sonne plus.
Celui qui au Festival international du film d’Aubagne dévorait,
avancé sur son fauteuil, les mains soutenant le menton,
les yeux grand ouverts, les longs-métrages comme les courts,
de la même manière qu’un enfant engloutit une glace. Celui
qui toujours au Festival international du film d’Aubagne
refusait de prendre les navettes emmenant le matin les participants
au centre-ville et les ramenant le soir à leurs hôtels et
en conséquence faisait ronfler chaque jour sa splendide
Vespa verte. « Parce qu’il faut toujours rester
indépendant », disait-il.
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