Le père de la ciné-marionnette
|
 |
|
|
Souvent comparé à Walt Disney dans
les années 1920-30, le pionnier du cinéma d’animation Ladislas
Staréwitch a sombré progressivement dans l’oubli après l’avènement
du cinéma sonore. En cinquante ans (1909-1959), le réalisateur
d’origine lituanienne a réalisé une centaine de films, dont
la majorité lors de son exil en France. Beaucoup ont remporté
un succès international à leur sortie, mais l’évolution
des technologies et l’industrialisation de la production
cinématographique ont lentement relégué le père de la poupée
animée à un statut d’artisan un peu folklorique.
Pourtant, cet autodidacte passionné d’entomologie a influencé
bon nombre de cinéastes avec ses fameuses “ ciné-marionnettes ”.
Animaux animés, peluches mouvantes et parlantes, créatures
fantastiques ou anthropomorphes, les personnages de Ladislas
Staréwitch font entrer petits et grands dans un univers
mêlant poésie et truculence. En 2003, plusieurs films de
Staréwitch ont été restaurés et sont sortis en salles. Des
petits bijoux à aller voir absolument !
 |
|
|
|
Citons d’abord un long métrage,
son œuvre maîtresse réalisée en 1931, Le Roman de Renard.
On y retrouve les personnages du fabliau médiéval, tels
que le loup, le renard, le blaireau, l’ours, le lion (le
roi des animaux bien sûr ! ), et une multitude d’insectes
et d’oiseaux. Pour réaliser des plans rapprochés et des
plans d’ensemble de toute cette ménagerie, le cinéaste
a construit une centaine de marionnettes. Dotées d’une ossature
sculptée dans du liège ou du bois, recouvertes d’une peau
de chamois et cousues à la main, ces poupées ont nécessité
des mois de travail. Staréwitch, qui travaillait uniquement
avec sa femme et ses deux filles, concevait des articulations
amovibles pour les marionnettes, permettant d’animer avec
précision chaque partie de leur corps. Il imaginait des
trucages si ingénieux pour donner vie à ses poupées qu’elles
acquéraient une expressivité quasi humaine. “ J’ai
beau avoir vu le Roman de Renart 70 ou 75 fois, j’ai été
encore étonnée la semaine dernière en voyant la version
restaurée. On voit les gorges roucouler, les plumes se soulever,
ou alors la tristesse poindre au coin d’un œil en peau de
chamois ” , raconte la petite-fille du réalisateur,
Béatrice Martin-Staréwitch.
L’autre film à découvrir sur grand écran, Les Contes
de l’Horloge magique, est un programme de trois courts
métrages réalisés entre 1924 et 1928. Coproduits par Béatrice
Staréwitch, le Forum des images et Gebeka, ces courts métrages
rappelleront la poétique du Roi et l’oiseau ou l’esprit
d’ Alice au pays des merveilles, mais étonneront
par leur prouesse technique, trente ans avant l’apparition
de l’ordinateur. Photomontages, transparences et superpositions,
le génie de Staréwitch résidait dans sa maîtrise de la technique
et l’accumulation de trucages permettant toutes les fantaisies
imaginables.