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Thierry Fremaux (c) D.R. THIERRY FREMAUX
Directeur de l’Institut Lumière
Délégué général du Festival
de Cannes
Entretien réalisé
le 20 juin à Lyon
par Bernard PAYEN


« Revenir à la notion de plaisir cinéphile »

Depuis près de trois ans, on a surtout médiatisé le nom de Thierry Frémaux pour parler du festival de Cannes, et débattre le temps de quelques semaines de la subjectivité de la sélection qu’il présente chaque année. Mais Thierry Frémaux, c’est aussi le directeur de l’Institut Lumière, qui fête cette année ses vingt ans d’existence. Autrement dit un cinéphile fin et sensible, qui entré au printemps 1982 comme simple employé passionné de cinéma dans la Villa Lumière, alors dirigée par Bernard Chardère et déjà présidée par Bertrand Tavernier, en fut nommé directeur artistique en octobre 1991.

Aujourd’hui l’Institut Lumière, créé pour « faire exister le cinéma là où il avait été créé », a permis la reconnaissance à part entière des Lumière (et de ses opérateurs) comme de véritables artistes, tout en valorisant leurs films à l’ échelle internationale. Haut lieu de la cinéphilie lyonnaise, il représente une véritable petite cinémathèque dynamique, avec ses propres collections (film et non-film), un musée, un centre de documentation spécialisé, des éditions (en collaboration avec Actes Sud), un service de formation du Jeune Public, et une programmation affranchie de tout sectarisme. La rue et le Hangar du Premier Film (classé comme Monument Historique) sont devenus des lieux de pèlerinage à part entière : les plus grands cinéastes (Kazan, Boorman, Wenders, Mankiewicz, etc) y sont passés.

Dans cet entretien, Thierry Frémaux revient sur l’identité de l’Institut Lumière avant d’évoquer sa conception libre et singulière de la cinéphilie



  Vilmla Lumière (c) D.R.
Objectif Cinéma : L’Institut Lumière fête aujourd’hui ses vingt ans. Comment avez-vous fait en sorte de dépasser le cadre inévitable et un peu étroit de « l’institution » ?

Thierry Frémaux : Cela fait dix ans que je dirige l’Institut Lumière, mais j’y suis d’abord entré comme bénévole, il y a vingt ans. L’Institut Lumière est né au forceps : personne n’a demandé à Bernard Chardère et Bertrand Tavernier de concevoir ce projet. À l’époque, il existait juste une sorte de mouvement social, intellectuel à Lyon pour sauver le hangar et le château Lumière. La culture de débrouillardise et la nécessité de convaincre nous ont toujours permis de passer par-dessus l’institutionnalisation. J’ai toujours pensé, en tant que directeur de l’Institut Lumière, qu’on ne serait jamais menacé si on sauvait nos financements annuels, si on assurait nos ressources propres et si on continuait à faire du bon travail. Quand Joseph Mankiewicz est venu, il y a dix ans, j’ai vu une telle émotion dans ses yeux que je me suis dit que l’on serait « coupables » de ne pas inviter les grands metteurs en scène, rue du Premier Film. Nous avons toujours travaillé en étant aidés par la magie de travailler en ce lieu, avec le sentiment du devoir à accomplir et le soutien des amis. C’est ainsi que l’on a échappé au côté institutionnel, quand bien même on s’appelle « institut ». Le mode de fonctionnement de l’Institut Lumière, pourtant classique (association loi 1901 financée à 70 % par les élus des collectivités territoriales et publiques, et 30 % de ressources propres) fait qu’on travaille dans une grande liberté.