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 SYNOPSIS :
 La vie de Barry Egan est simple. Entre son travail et ses sept
 sœurs, le grand jeune homme na jamais eu le temps de faire sa
 vie ou de tomber amoureux. Depuis qu'il est tout petit, elles
 l'accaparent, le conseillent, le dirigent sans répit.
 L'arrivée dune mystérieuse femme et d'un harmonium
 pourraient bien changer tout cela.
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 | POINT DE VUE 
 
   Punch-Drunk Love
 commence dans un hall désaffecté,
 un garage sans voitures : sur la gauche du cadre, pan d'espace
 vide et étiré au format panoramique, un employé
 se plaint au téléphone des méthodes employées
 pour une notice qui devrait le faire bénéficier
 d'offres spéciales. C'est le premier trait de pinceau
 d'Anderson. Touche bleue sur fond blanc. D'emblée une
 impression de conversation anodine ouvrant sur une lutte face
 au grand tout abstrait et cynique. D'emblée aussi,
 l'individu face à un système social dont on
 connaît la voix, mais dont on ignore l'identité. 
    Cet employé, Barry,
 a sept sœurs. Il fait appel aux services (" Love by call
 ") d'une société anonyme qui se met à
 lui extorquer de l'argent. La rencontre avec une collègue
 d'une de ses sœurs et l'arrivée impromptue d'un harmonium
 devant son lieu de travail finissent d'achever le tableau.
 Ce qui fascine dans Punch-Drunk Love ? Moins l'ignorance
 du monde de Cruchon-Cruchonne (Adam Sandler et Emily Watson
 en couple d'imbéciles heureux), que l'entreprise de
 destruction de ceux-là mêmes qui l'ont tissé.
 Pas étonnant que cette caste invisible, emmenée
 par les sœurs envahissantes de Barry, entraîne chez
 lui des accès de fureur. Fabuleux personnage de cinéma
 que Barry Egan. Lors d'un dîner avec Lena, il défonce
 les murs des toilettes ; prié de déguerpir,
 il refuse, son visage même exprimant la négation,
 le pur mensonge dans ce qu'il renferme d'enfantin, d'innocent.
 On touche ici à l'autisme, à la folie furieuse
 du personnage. 
    
 
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 |  |  |  Mais Punch-Drunk Love
 ne se réduit pas à l'expressivité et
 à l'invention inouïes du jeu d'acteur (les yeux
 d'Huskey d'Emily Watson, les pas de danse dans le supermarché
 d'Adam Sandler), ni aux blocs d'innocence et de fureur contenues
 des personnages soudainement jetés à la face
 du monde. Ce qui sidère, ici, réside dans l'utilisation
 de l'espace cinématographique, qui devient une scène
 mouvante sur laquelle glissent et chutent les corps. Glissades
 immobiles : Barry sort de son bureau en trois temps : dos,
 profil droit, profil gauche. Anderson chorégraphe et
 régisseur présente un don réel pour les
 spectacles lumineux (les lumières scintillantes de
 l'arrière-plan), sa palette pointilliste donnant vie
 au bleu de la nuit, au gilet rose de Lena. D'un travelling
 arrière accompagnant le couple à la sortie d'un
 restaurant naît une douce épaisseur cotonneuse.
 Ce ralentissement, bascule en apesanteur, signe autant la
 nature flamboyante et doucereuse du couple, qu'un nouvel usage
 du Technicolor. Le bleu éthéré, l'impression
 d'éveil nocturne du couple, font écho aux années
 50 pour l'aspect "comédie musicale de luxe" ; aux années
 70, pour l'intriguant désenchantement qui émane
 toujours des plans généraux gorgés de
 luminosité ou enclins aux couchers de soleil.
 
 
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