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                   «Le plus robuste des granits devant la 
                    plus fragile des fleurs».  
                  
                  Voilà résumé en une phrase 
                    le schéma de départ du scénario de Léon. Chronologiquement 
                    Léon est le cousin de Victor, ce «nettoyeur» cinglé qui dissout 
                    les cadavres à l’acide chez Nikita. Victor est crédible car 
                    il n’a que dix minutes de vie, Léon a besoin d’autre chose. 
                    Ce mort-vivant doit dévoiler son humanité, mais il ne peut 
                    pas le faire tout seul. Un touchant petit être, Mathilda, 
                    va alors l’y aider. Seule rescapée du massacre de sa famille, 
                    elle fait petit à petit son nid chez Léon. Et Besson détecte 
                    alors cette «équation magique»:  
                  «Il vit mais il est mort. 
                    Elle devrait mourir mais elle survit. Elle lui amène la vie. 
                    En acceptant, il accepte sa mort. Mourir pour donner la vie. 
                    Géométrique et cellulaire ».  
                  Logique et émotion ressortent 
                    immédiatement de cet énoncé. Besson vient de résoudre son 
                    premier problème, et par là même de donner un souffle à son 
                    œuvre. Et cette œuvre-là, Léon, s’inspire beaucoup 
                    de la Genèse... Mais pour le moment, ce n’est qu’un avant-propos. 
                    Il s’agit maintenant pour Besson de transposer tout cela à 
                    l’écran, d’amplifier ce qu’il vient d’écrire noir sur blanc. 
                    Il lui faut donner une force à ce souffle. Et avec un souffle 
                    pareil, il ne faut pas s’étonner de la fin qu’il a «choisie» 
                    pour Léon. Quoi qu’il en soit, la force intérieure 
                    qui vit dans l’œuvre achevée, toujours plus riche et plus 
                    complexe que l’intention, ne le sera que davantage. Surtout 
                    qu’avec Besson, il est très difficile d’imaginer un de ses 
                    films à la seule lecture de son scénario...  
                  Cette force intérieure se 
                    construit d’abord sur l’approfondissement de l’œuvre de l’esprit. 
                    Léon doit étoffer son scénario. Il doit pouvoir s’appuyer 
                    sur des éléments secondaires et interdépendre avec eux. Besson 
                    fait très attention à toutes les composantes de ses films, 
                    ce qui d’une certaine façon les empêche d’être secondaires. 
                    Elles ont juste été créées après, elles se sont greffées naturellement 
                    à l’idée originelle. Elles ont en réalité une excellente raison 
                    d’être partie intégrante de l’univers du film, dans leurs 
                    propres proportions. Et chez Léon, elles s’incarnent dans 
                    une plante, des jeux, un parc... Chacune d’elles semble avoir 
                    une sorte de vie indépendante : fausse piste. Car si elles 
                    peuvent n’apparaître que comme des détails, elles prennent 
                    finalement toute leur résonance, leur acoustique, leur  sonorité 
                    dans la synergie à laquelle elles concourent. Besson s’appuie 
                    sur leurs effets libres et séparés en surface, mais qui convergent 
                    à la fin du film dans la même émotion. C’est sans doute ce 
                    qui procure le sentiment que rien n’est gratuit dans la façon 
                    dont il termine Léon. Il utilise simplement les lois 
                    de son art à cent pour cent : Léon est une fiction, 
                    ce dont il se sert à juste titre. L’histoire existe en elle-même, 
                    dans son univers cinématographique, indépendamment du monde 
                    extérieur. La fin ne détonne pas du reste, dans la mesure 
                    où elle prend place à l’intérieur de cet univers, logiquement 
                    et émotionnellement proportionné.  
                  
                     
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                  Cet univers, et plus généralement 
                    cette oeuvre, ont en fait imposé des exigences auxquelles 
                    le réalisateur a été chargé de répondre. C’est une des raisons 
                    pour lesquelles le choix des acteurs est pour Luc Besson de 
                    toute première importance. Non seulement il opte pour les 
                    meilleurs acteurs, mais en plus, il va chercher et exploite 
                    ce qu’ils ont de plus fascinant et d’envoûtant pour le rôle. 
                    La politique est simple, il veut «(...) un acteur à cent pour 
                    cent, un qui va lui donner ses tripes (...)»Et il ne se contente 
                    pas seulement du premier rôle. Il a, pour Léon, quatre 
                    personnages piliers dont il est indispensable que le jeu soit 
                    différent, mais équilibré. Ils doivent rester dans leurs propres 
                    nuances, leurs propres couleurs, leurs propres teintes, et 
                    dans celles du film.  
                  Pour répondre aux exigences 
                    de son œuvre, Besson a trouvé une autre solution, celle de 
                    la musique. Et encore  une fois, il a fait appel au talent 
                    d’Eric Serra, qui est une valeur sûre pour lui. 
                     
                     
                     
                   
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