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Gallimard souhaite aimer, même par l’illusion et la tromperie. C’est son intérieur qui le pousse à aller vers Butterfly, qui lui semble être un reflet magique. Cette rencontre transforme sa vie. C’est donc par l’illusion, la tromperie, que le corps se retrouve mentalement désirable, et désire accéder à des fantasmes voilés par une réalité absorbant une logique trop souvent rationnelle. Gallimard se forge sa propre image de l’être aimé. Le corps a donc une fonction presque photographique, une dimension physiologiquement importante. Il se substitue à la réalité brute envahissante en acceptant que M.Butterfly réorganise ses "sens". Cette liaison entre Butterfly (homme-femme) et Gallimard est hors du commun. Une sensualité précieuse aux yeux de Gallimard se met en valeur. Une "autre" dimension nocturne remodèle les corps et les installe dans un espace qui leur convient. Le corps de Gallimard se met à croire en l’incroyable, et puise dans l’essence corporelle et le romantisme de Butterfly, afin de définir sa nature propre, qui s’exhibe en lui.


  Existenz (c) D.R.
Dans Crash (96), avant-dernière oeuvre en date de Cronenberg, on assiste à la naissance de nouveaux appétits sexuels. Les accidents de la route n’empêchent pas aux personnages d’assouvir leur sexualité. Au contraire, les corps déchiquetés laissent entrevoir une nouvelle forme d’instinct sexuel. C’est l’évolution (même, la mutation) de la sexualité qui fait avancer le récit. Il subsiste une forte volonté à acquérir la puissance par le biais de la sexualité. Les accidents marquent douloureusement les corps. A partir du choc mécanique, le récit s’articule de l’intérieur. C’est de l’intérieur, une fois de plus, que les personnages vont se feindre dans une autre réalité, afin de puiser les ressources nécessaires à une sexualité mentalement active, et corporellement jouissive. Une jouissance découverte par les blessures des accidents : lésions multiples et objets tels que la machinerie médicale greffée sur les jambes de Rosanna Arquette. Les personnages accidentés vont chercher dans la mécanique contemporaine leur nouvelle forme d’instruction sexuelle. Cronenberg est un cinéaste moderne qui porte toujours un oeil précis sur les mutations technologiques capables d’apporter une nouvelle façon de vivre la vie. Il s’intéresse particulièrement à l’évolution artificielle de l’homme. Autour des personnages déchiquetés par les accidents, il y a une personne qui reste maître du jeu et de ses désirs : c’est Vaughan, un photographe médical. Il cultive la symbiose entre automobile et sexualité de façon à y faire jaillir une nouvelle forme de fantasme. De ce fait, il s’insère entre le couple Déborah Unger/James Spader, qui cherchent à retrouver leur sexualité, pour décupler sa volonté de puissance, symbole Nietzchien par excellence. Vaughan met en scène et gère le mouvement du couple. Il pourrait être le double de Cronenberg-metteur en scène, qui trouve en Vaughan l’allié idéal afin qu’il se frotte lui-même avec le décor et avec les corps déchiquetés. Dans ce film, l’imaginaire jaillit de la mécanique et des tôles froissées. Les accidents projettent les corps des personnages dans l’espace illimité du fantasme. On se situe alors dans un récit qui tient presque de l’ordre du tragique (Grèce Antique), où la souffrance et le plaisir (la jouissance) sont liés indiscutablement à la chair martyrisée, déchirée, filmée avec une grande maîtrise.

Le Festin nu (c) D.R.
Dans chacun de ces trois films majeurs, la vision du corps est différente dans la substance, mais révèle que les corps chez Cronenberg sont toujours sujets à se transformer et à faire apparaître à chaque fois une nouvelle forme de vie (sexuelle, imaginaire, intuitive) : ce qui amène inévitablment une autre faculté d’être. Une autre manière de détourner la réalité. En un mot, accéder à ce que le corps désire dans/de son intérieur : sa propre réalité.