Annuaire boutique
Librairie Lis-Voir
PriceMinister
Amazon
Fnac

     

 

 

 

 

 

Nogdabovitch : "Je repense aux Trois canailles (1926). Dans ce film il y a cette séquence mémorable que figure le plan célèbre du bébé abandonné sur le trajet des concurrents, et arraché, à la dernière seconde, à une mort certaine. Il y a d'autres scènes spectaculaires et mélodramatiques entrecoupées de scènes humoristiques. Mais le scénario trop simpliste ne pouvait soutenir une telle mise en scène.

Daylins : "J'ai revu, il n'y pas longtemps, les premiers films de Ford : Il semble avoir déjà tous les talents : il en retirait sans doute beaucoup de fierté sur le plan professionnel, il était capable de réussir aussi bien des effets spectaculaires que des moments d'intimité, des scènes de bataille que des scènes d'amour. Il excellait aussi dans la comédie. Bien sûr, il était moins à l'aise quand il s'agissait de traduire les complexités psychologiques.

  Objectif Cinéma (c) D.R.

Nogdabovitch : "Est-ce que tu es d'accord avec moi pour dire que le travail qu'il réalisa pour les studios Universal (1917-1921) était plus intéressant et personnel que celui qu'il a fait pour la Fox ?"
"Oui, on peut dire ça. Au cours des cinq années de collaboration avec Harry Carrey, Ford écrivit lui-même ses scénarios et disposa d'une liberté considérable dans le cadre du western. A la Fox, on lui imposa de très nombreux tournages pour lesquels il avoue n'avoir pas éprouvé d'émotions particulières. Mais ce qui l'intéressait, c'était de tourner. Il a toujours adoré faire des films, souvent en dépit des scénarios. C'est le travail de groupe qui l'intéressait. Quand on lui demandait pourquoi il aimait tourner des westerns, il répondait simplement : parce que l'équipe du film était extraordinaire !" Il aimait les cascadeurs et les techniciens. Et puis il a toujours eu une préférence pour les tournages en extérieurs."

Daylins : " Il adorait le travail en collaboration. Il disait toujours qu'une grande proportion des scènes les plus extraordinaires qu'il ait filmé étaient inspirées de ce qu'avaient connu ou effectivement vécu les membres de sa compagnie."

Romac : "D'après tout ce que vous venez de dire, on peut dire que le talent de narrateur de Ford n'est pas à chercher du côté du scénario."

Daylins : " Le scénario était important, mais il fallait qu'il soit simple. C'était une sorte de condensé de matière à histoires."

Romac : "Le scénario est important parce qu'il est la cause première."

Daylins : " Exactement."

Nogdabovitch : " Ce qui me semble important, c'est le casting. Après tout, il faut raconter son histoire à travers les gens qui vont la jouer. On peut avoir un scénario complètement idiot, un bon casting en fera peut être un bon film. Prenons, par exemple, Les Trois Canailles. Dans ce film, Ford nous montre la ruée vers les terres du Dakota. Plusieurs membres de la troupe y avaient participé réellement. Ce sont eux qui rendaient le film intéressant."

Romac : "C'est le talent suprême de Ford pour les seconds rôles."

Daylins : « Premier rôle, second rôle, c'était pareil pour Jack. Il accordait autant d'importance aux figurants qu'aux stars. »

Nogdabovitch feuilletait son cahier à la recherche d'un mot, d'une réflexion de Ford : "J'ai trouvé quelque chose à propos des seconds rôles, je vais vous lire : " J'ai toujours eu la certitude que les petits rôles, quel que soit le film, sont aussi importants que le rôle principal, puisque ce sont eux qui habitent l'histoire, qui construisent l'atmosphère, qui crédibilisent les films."