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Le Hasard (c) D.R.
Au-delà de son habile construction narrative et de son insensé charge émotionnelle, Le Hasard, interdit de sortie sur le territoire polonais, illustre l’impasse dans laquelle se trouve la jeunesse de son pays, condamnée à choisir entre le pouvoir et la clandestinité, la collaboration et la résistance. Dès le premier plan sur les émeutes matées dans le sang par le pouvoir en place, Krzysztof Kieslowski n’est pas tendre envers les autorités de son pays. Il ne condamne pas l’idéologie communiste mais bien les dérives de son application. La fin du deuxième segment est particulièrement explicite : la grand-mère de Witek interroge son petit fils sur l’origine de sa compagne. Celui-ci lui répond qu’elle est juive. «Les juifs comptaient d’excellents communistes dans leur rang » réplique la femme âgée. Avant de l’avertir, le sourire aux lèvres, qu’elle vient d’écouter à la radio (clandestine bien sûr) que des grèves venaient de débuter.

Ce souci de dénoncer les abus de pouvoir se retrouve dans Sans fin, portrait poignant d’une femme qui ne peut survivre au décès de son mari. En filigrane, il met de nouveau en image l’oppression que subit la population polonaise. Antek, son mari, avocat, travaillait avant son décès à la libération d’un ouvrier accusé d’être le meneur d’une grève interdite par les autorités. Le discours est limpide : sous la dictature militaire de Jaruselski, sphère privée et sphère publique se confondent. Le quotidien est sans cesse perturbé par sa prise de partie ou non contre le pouvoir en place. Dissimulation de preuves, pression constante qui se matérialise par de petits riens dérangeants, comme ce point d’interrogation ajouté à une liste de noms, combat juridique perdu d’avance ; le pouvoir est partout, le libre-arbitre n’existe plus, la situation polonaise semble sans fin... Profondément pessimiste sur l’avenir de la société de son pays, alors en plein désagrégation, Kieslowski établit même le suicide comme unique solution envisageable.


Un monde de fantômes

  Sans fin (c) D.R.
Le thème de l’absence, du manque affectif et du trouble qu’il suscite est une récurrence du cinéma de Kieslowski. Déjà dans La Cicatrice, le personnage principal, Stefan Bednaz, ne parvient pas à s’épanouir sans sa famille avec laquelle il s’est séparé en acceptant de diriger le chantier de la nouvelle usine chimique de la ville d’Olecko. Filip, L’Amateur, vit sa passion dévorante pour l’art cinématographique dans le conflit avec des proches qui rejettent peu à peu le « mouton noir ». Très marqué par la disparition de sa mère au début des années 80, le cinéaste polonais fait de Witek, le héros du Hasard, un jeune garçon élevé sans l’autorité maternelle et qui ressasse les premiers instants de sa vie.  Sans Fin débute par le récit face caméra de la mort d’Antek, décrite par celui-ci. Tel un fantôme, il continuera pendant le film de roder autour de son épouse, d’être un observateur omniscient de ses moindres faits et gestes.