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Enfin, l’obstacle d’ordre « subjectif »
englobe les erreurs de jugement du héros et de l’héroïne.
Contrairement aux deux autres formes d’obstacles étudiés,
c’est un obstacle par définition interne à la psychologie
du héros et de l’héroïne. Cette forme d’obstacle est véritablement
au cœur des comédies romantiques de Richard Curtis, que nous
pourrions aussi intituler « comédie de l’erreur ».
Il représente en cela le dernier rebondissement avant la réunion
finale du couple romantique. Ainsi dans Quatre Mariages…,
Charles prend la mauvaise décision d’épouser Henrietta, dans
Coup de foudre à Notting Hill, William se trompe en
refusant la déclaration d’amour d’Anna et Bridget, après la
scène de duel entre Daniel et Mark, choisit de ne plus voir
ce dernier, et le Premier Ministre de Love actually
décide de renvoyer son intendante. La place de l’erreur dans
l’intrigue implique une attention particulière à la logique
du récit et à la crédibilité de l’évolution psychologique
du héros qui va prendre la mauvaise décision. Triomphant de
tous ces obstacles, l’Amour est ainsi sublimé. Lors de la
conférence de presse de Love actually, Hugh Grant proposait
avec humour une certaine définition de l’intrigue romantique
à l’anglaise similaire à celle des films de Richard Curtis :
« Je crois qu’aimer quelqu’un c’est l’aimer malgré
tout, envers et contre tout, c’est une forme d’amour aveugle
inconditionnel, un petit peu comme l’amour que Tony Blair
et Bush se portent. C’est la forme la plus pure de l’amour
britannique en ce moment… »
Humour et comique « effet
spécial »
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La question de l’humour est, bien sûr, au
cœur du processus d’écriture de Richard Curtis. C’est un peu
finalement le sujet, le verbe et le complément dans la phrase
curtisienne. Hugh Grant illustrait assez bien cette idée récemment
lors de la conférence de presse de Love actually :
« En fait, si je devais vraiment trouver une caractéristique
à Love actually, et bien je crois que ce serait sa
qualité britannique qui fait partie intrinsèquement de l’aspect
comique. L’idée même d’Anglais amoureux, c’est une plaisanterie
en soi. Vous savez, les top priorités pour nous en Angleterre,
ce sont nos chiens, boire de la bière, jouer au golf, gagner
de l’argent. Alors qu’ici en France, on serait presque choqué
de trouver des personnages qui ne soient pas désespérément
amoureux. Donc je crois que le fait de voir ces Anglais si
stricts finalement, tomber amoureux, eh bien c’est un plaisir
en soi. » Dans les propos mêmes de l’acteur principal
des films de Curtis, on peut relever les ingrédients de l’écriture
de ce dernier à savoir bien sûr l’ironie et l’autodérision
comme sorte de seconde nature. Il est intéressant à ce sujet
de constater combien Hugh Grant lui-même s’est approprié cette
forme d’humour pour répondre aux questions des journalistes,
parfois assez surprenantes. Une sorte d’armure, en somme,
non dénuée de charme, et qui relève parfois de l’exercice
de style. Chez Richard Curtis, le comique se retrouve surtout
dans le langage : les discours cafouilleux de Frère Gérald
(incarné par le célèbre Rowan Atkinson, alias Mr Bean, justement
né de la plume de Richard Curtis !), ceux de déclaration
d’amour de Charles (Hugh Grant), ou bien celui plus récent
de Colin Firth dans Love actually, témoignent de ce
constat curtisien que les mots sont souvent plus forts que
les images et même au cinéma. Ainsi à propos du chapelet d’injures
lancé plusieurs fois par Charles dans Quatre Mariages et
un Enterrement, Richard Curtis déclarait : « On
avait l’habitude de dire que, puisqu’on avait pas l’argent
pour commencer avec une course-poursuite en voiture ou beaucoup
d’explosions, la seule explosion que l’on pouvait avoir était
celle de la langue anglaise qui était donc notre effet spécial. »
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