Les deux réalisateurs, sans véritablement
avoir adapté le récit de Casanova avec systématisation, font
de leurs œuvres une ouverture dialogique qui nous offre une
retranscription plausible du mythe de l’aventurier latin.
Ce dernier permet un va-et-vient possible entre le texte littéraire
et le spectacle filmique élargissant notre savoir encyclopédique
à toute forme d’intertextualité. Narcisse, Dom Juan, Casanova
représentent l’archétype du séducteur. Etymologiquement, séduire
vient du latin seducere qui signifie « séparer »
et le rôle du séducteur que détient Casanova est de mettre
à l’écart le monde qui l’entoure pour s’intéresser au « moi »
et à la personne désirée.
Le Septième Art transpose notre héros autobiographe pour devenir
un contemporain médiatique. Le cinéma nous sensibilise en
fait à un texte peu lu aujourd’hui. Comencini dira lui-même
à propos de sa production : « un certain type de
film met le spectateur dans un état d’âme qui lui permet peut-être
[…] de se trouver dans des dispositions légèrement différentes
pour être sensible à des problèmes qu’autrement il aurait
ignoré. » (20) Avec la libération sexuelle de
l’après 68, Casanova fait figure d’avant-gardiste et la mauvaise
impression qu’il nous laisse est peut-être la projection de
notre jalousie et de notre incapacité d’agir sur la monotonie
du quotidien. La pornographie semble un succédané de tous
les fantasmes humains et Casanova a eu au moins le mérite
de les expérimenter sans en être le spectateur mais l’acteur.
Cependant et particulièrement chez
Fellini, « l’érotisme est complètement gommé pour donner
à Casanova des allures d’obsessionnel de l’exploit, sexuel. »
(21) Les deux cinéastes italiens ont du être fasciné
par cet être immoral tout comme le Cardinal de Retz évoquant
les frasques passionnelles de Madame de Chevreuse. Contrairement
à Casanova qui se détruit sans respecter véritablement « la
femme », Fellini a une foi en elle et en son pouvoir salvateur :
« c’est elle qui est censée le rendre meilleur, qui
le protège comme la mère universelle, même si elle devient
quelquefois inaccessible comme une épouse ou une madone. »
(22)
Le cinéaste met finalement en échec le système de Casanova
qui refuse toute responsabilité. L’aventurier s’enferme
dans une spirale infernale qui fait non seulement référence
au Satyricon mais aussi à La DivineComédie
de Dante. Comencini évoque avec tendresse sa douce inconstance
et Casanova lui-même relate implicitement dans son récit
une mythologie personnelle de l’isolation mortifiante qui,
au nom de l’amour, le dédouane de toute culpabilité. Impuissant
à se ressaisir, il restera un éternel insatisfait comme
Narcisse et Dom Juan.
Gilles Visy, de lUniversité
de Limoges, et l'auteur d'une thése,
Le Colonel Chabert au cinéma édité
par les Editions Publibook.
Sujet
: Ladaptation cinématographique
dune uvre littéraire nous
fait passer dun point de vue interprétatif
à un autre, et aboutit à une sorte
de transcodage de lécriture littéraire.
A partir de létude du Colonel Chabert,
écrit par Honoré de Balzac et
adapté au cinéma par René
Le Hénaff en 1943 et par Yves Angelo
en 1994, Gilles Visy sinterroge sur le
rapport complexe quentretiennent le texte
et limage.
A lire
: Télécharger
les 11 premieres page (PDF) Préfacé de
: Stéphane Vachon (spécialiste
de Balzac) Post-face de : Yves
Angelo (réalisateur) Nbr pages : 366 pages Genre : Recherche
Titre:
Casanova Réalisateur
: Frederico Fellini Scénario :
Frederico Fellini et Bernardino Zapponi Acteurs : Donald Sutherland,
Tina Aumont, Cicely Browne, Carmen Scarpitta,
Clara Algranti, Margaret Clementi Formats originaux respectés
: 1.77 - 4/3 Langues : Italien,
Anglais, Français ; Sous titre : Français Editions : Carlotta
Films