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Un chien andalou (c) D.R.

Son premier  film  Un chien  andalou   (1929)  est le croisement de deux rêves. En rencontrant Dali, Buñuel  évoqua un nuage effilé coupant la lune suivit d’une lame de rasoir tranchant un œil. Le deuxième rêve, tout aussi surréaliste, décrit une main pleine de fourmis. Mieux qu’un cadavre exquis Buñuel s’enflamma : « Et si nous faisions un film à partir de ça ? ». (2) Presque Dadaïste, le réalisateur continuera ses frasques surréelles lors de L’Age d’or. Réalisé un an plus tard (1930), sur un style très corrosif et provocateur, le cinéaste souhaite paradoxalement abolir et maintenir la frontière entre rêve et réalité. Il ne s’agit pas d’un rêve freudien, il se construit plutôt sur une surréalité qui contient la réalité, à savoir, une vision cinématographique qui transgresse ce que tout spectateur a l’habitude de voir. Il faut solliciter « l’œil sauvage » (3) dont nous parle Breton dans Le surréalisme et la peinture. Ces deux films sont des documentaires surréels sur des tranches de vie fantasmées dont le grotesque amène un naturalisme révisé, caustique et sans doute plus réel que jamais. Le surréalisme de Buñuel exprime non seulement ses désirs refoulés, mais il élabore également un paradoxe indémontable entre rêve et réalité. La parodie et la provocation sont les faire-valoir d’une quête des comportements humains qui dépasse le cliché pour faire vrai et naturel. 


LE SURREALISME COMME EXPRESSION DU FANTASME

Dès les débuts du cinéma, notamment avec Méliès, le contenu manifeste de la vie est pour la première fois mise en spectacle et sa représentation dévoile une surréalité à laquelle le public adhère grâce à la magie du montage. Le voyage dans la lune devient possible, le cinéma de Méliès fait disparaître et réapparaître des personnages en chair et en os, la pellicule devient un poème irréel où les fondus enchaînés remplacent subtilement la rime littéraire par le rythme du Septième Art.

  Pedro Almodovar (c) D.R.

La caméra peut désormais tout dire et montrer, elle atteint : « le point de l’esprit d’où la vie et la mort, le réel et l’imaginaire, le passé et le futur, le communicable et l’incommunicable, le haut et le bas cessent d’être perçus contradictoirement. » (4) A partir de ce concept, Buñuel fera du cinéma un exutoire, une expiation, une exploration métaphorique de tous les fantasmes humains qui ne peuvent laisser insensibles le spectateur. L’amour, le sexe sont aux premières loges. En dehors de l’érotisme latent qui caractérise tous les films de Buñuel, les comportements amoureux ne sont pas paisibles mais plutôt déviants, comme dans les films de Pedro Almodovar.

La gamme amoureuse se décline de la façon suivante : de la sensualité au sadomasochisme en passant par le fétichisme. La femme devient « cet obscur objet du désir » à travers lequel le réalisateur demeure une sorte de voyeur. La technique cinématographique trahit les désirs du cinéaste en passant par les plans rapprochés sur les jeux de jambes jusqu’aux rapides fondus enchaînés dans Le Chien andalou où une femme se retrouve déshabillée en une fraction de seconde entre les mains d’un homme. Le fondu enchaîné est l’expression d’un choc. Il s’agit d’une conception de montage narratif qui a pour rôle de raconter une action, ici le désir sexuel, par l’assemblage de divers fragments de réalité. Cette succession d’événements est destinée à donner une totalité significative du fantasme, de l’inaccessible. Néanmoins, le concept reste flou entre le désir et le viol.