|
|
|
|
Cette question de pourquoi Délits
Flagrants est un film de cinéma est souvent revenue. La
manière dont le film a été réalisé est une des façons d’y
répondre : parler de sa longue préparation, du tournage
en lui-même avec les conditions imposées par l’institution,
du format de tournage (en pellicule et non en vidéo), du travail
sur le son, du montage. C’est souvent à partir de données
très concrètes que les élèves ont pris conscience de certaines
choses : quand je leur demande combien de temps le tournage
a duré à leur avis, la plupart du temps, ils évoquent une
durée de tournage à peine plus longue que celle du film (une
ou deux journées) … Je leur explique que c’est bien plus …
même si c’est bien moins que ce que R. Depardon a l’habitude
de faire. Au cours de certaines discussions, des élèves finissent
aussi par se rendre compte qu’ils ont déjà vu d’autres documentaires
au cinéma : Microcosmos par exemple. Même si ce
dernier, dans son traitement, est plus proche d’un film de
fiction : beauté des images, plongée dans un univers
« inconnu », rôle de la musique et de la voix off
etc.
On revient toujours sur l’usage dans le film des plans-séquences,
de cette lenteur et de son rôle, qui fait sens. Mais aussi
sur le rôle du montage, sur les coupes presque invisibles
à l’intérieur de ces plans séquences : finalement, sur
tout ce travail invisible qui fait du film ce qu’il est, sans
qu’on s’en rende tout de suite compte.
|
|
|
|
Pourtant, même si Délits Flagrants
a une forme peut-être à l’apparence difficile, il n’est
pas sans susciter des réactions, liées bien sûr au sujet
traité. Souvent les élèves évoquent le fait qu’il y a « une
majorité d’étrangers » parmi les personnes interrogées :
j’essaye à chaque fois de nuancer en leur faisant retrouver
les différentes personnes qui semblent venir de milieux
sociaux différents, tout en reconnaissant aussi cette impression
du spectateur de voir quand même pas mal de personnes d’origines
étrangères … Pour moi s’amorce là un point de vue du
réalisateur, pourtant à l’apparence si détaché de son sujet.
Je finis même par me dire que le choix même de R .
Depardon de faire un film sur ce sujet est déjà en lui-même
un « acte politique ». A la discussion avec des
élèves sur l’objectivité du film, j’essaye de leur montrer
en quoi Délits Flagrants a un point de vue (donc
subjectif) mais un point de vue qui n’est pas imposé, mais
proposé au spectateur.