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PLURALITÉ DES FILMS AFRICAINS

Il est plus que jamais temps de ne plus parler de « cinéma africain » ou du « cinéma d'Afrique », mais, véritablement, des films africains dans leur formidable diversité, parfois dans leur médiocrité et parfois dans leur génie. Une diversité en tout cas que l'on doit probablement, en partie tout du moins, à une pluralité d'ethnies, de langages et de dialectes - au-delà même d'une incomparable pluralité géographique et géopolitique.

«  J'accepte le mot cinéma d'Afrique, mais au pluriel ». Celui qui parle ici est nul autre que Idrissa Ouedraogo, un des maîtres du cinéma contemporain international. Idrissa Ouedraogo est un peu le Aimé Césaire du cinéma. Le cinéaste a d'ailleurs mis en scène une pièce de Césaire au théâtre (La Tragédie du Roi Christophe) à la Comédie Française. Cinéaste de la terre, mais pas seulement. Cinéaste des êtres humains, des rapports de force et d'indépendance, cinéaste de réflexions sur le monde.


  11sep

Tout récemment, le sketch réalisé par Ouedraogo pour le film collectif 11 Septembre (2002), dans lequel des enfants du Burkina Faso croient reconnaître Ben Laden, était d'une ironie désarmante. Ouedraogo terminait le film avec le sosie de Ben Laden « s'enfuyant » par avion et ce, à la tristesse générale des enfants qui le pourchassaient pour gagner la fameuse « Récompense » de Georges Bush. Ces enfants, yeux levés vers l'avion, lançaient alors dans un dernier soupir : « Reviens Ben Laden, on a besoin de toi ». Ce sketch proposait une vision osée, acide, différente et lucide sur le monde, avec entre ciel et terre : les enfants (d'Afrique) et l'absurde âpreté et inégalité de la condition humaine.

Idrissa Ouedraogo se positionne en franc-tireur depuis longtemps, connaissant mais refusant le langage et les recettes de l'Occident, voyageant mais s'enracinant dans son Afrique natale, revendiquant les spécificités des mondes africains. Yaaba (1989) reste ainsi comme un des films majeurs du cinéaste, et résume à lui seul la démarche de son auteur, et, tout comme ses personnages, son amour de la terre, des autres et des regards. L'occasion donc de revenir sur un vrai grand film dans la vraie petite histoire du cinéma mondial.


LA TERRE & L'EAU : LES FEMMES

Yaaba a été tourné au Burkina Faso (nom que l'on doit au « mooré » et au « dioula »). « Burkina » signifie « patrie des hommes intègres » et « Faso », « terre de nos ancêtres ». Dans Yaaba, on évoque ironiquement moins l'intégrité des hommes que leurs constants mensonges (faux aveugles, faux devins, faux gentils) et leur cruauté (rejet à jets de pierre contre «  Yaaba », la vieille femme que l'on dit sorcière). On y évoque en revanche cette « terre des ancêtres » (première image du film sur la tombe d'une mère disparue) et dès lors, la terre devient très vite dans Yaaba le territoire des femmes. Yaaba, la grand-mère.