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                  Rares, par contre, sont les personnages 
                    non fumeurs. Le plus évident, le plus significatif, est William 
                    Blake. Dead Man est, avec Permanent Vacation, 
                    le film le plus symbolique de Jarmusch : William Blake ne 
                    fume pas, il le répète sans cesse à ceux qui lui demandent 
                    du tabac - pratiquement tous ceux qu’il rencontre - ; aussi, 
                    il est un homme mort, noir comme de la cendre de par 
                    son nom ( et non pas blanc comme de la fumée ), et cela dés 
                    le début du film, où il est seulement blessé par une balle 
                    qui aurait dû le tuer, et qui finira, d’ailleurs par causer 
                    sa perte. Il est un sursitaire dont la blessure ne guérit 
                    jamais, qui bénéficie d’un certain temps pour se préparer 
                    au voyage dans l’autre monde, qui l’attend à la fin du film. 
                    Mort pour ce monde, le sera-t-il pour l’au-delà également 
                    ? C’est tout l’intérêt du voyage spirituel qu’il entreprend 
                    en compagnie d’un indien « nommé » Nobody qui le 
                    prend pour le fameux écrivain homonyme. Nobody veut qu’il 
                    fume du tabac ; lui-même en fume, comme il fume du peyolt, 
                    qui provoque des hallucinations. C’est ainsi d’ailleurs qu’il 
                    s’aperçoit que William Blake est déjà un cadavre. Et à la 
                    fin du film, alors que ce dernier meurt très symboliquement, 
                    selon une veille légende indienne, en s’éloignant en canoë 
                    dans le « grand océan de l’au-delà », il lui offre 
                    du tabac, car il sait qu’il en aura besoin.
                    
                    Dans le même ordre d’idée, il y a le prêtre asthmatique qui 
                    étouffe pendant la truculente confession du chauffeur de taxi 
                    romain - dans Night on earth -, incapable de l’empêcher 
                    de fumer ( et de parler ), alors qu’il y a dans le taxi même, 
                    comme il le lui fait remarquer en vain, un écriteau interdisant 
                    de fumer.
                    
                  
                     
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                    Il arrive aussi qu’on ne puisse fumer, 
                      même quand on le veut. C’est le cas qui se présente le plus 
                      souvent dans Down by Law. Enfermés dans leur prison, 
                      puis captifs de la prison naturelle que constituent les 
                      marais de Louisiane, les trois « complices » ont 
                      bien des cigarettes, mais pas de quoi les allumer. L’enfermement 
                      carcéral et naturel renvoie dans ce film à l’enfermement 
                      mental des personnages qui se murent dans leurs convictions 
                      pour Zack et Jack, ou que la barrière de la langue (ou simplement 
                      le fait d’être étranger) produit nécessairement, au début 
                      de chaque relation du moins, dans le cas de Roberto. Dans 
                      ce film, d’ailleurs, les personnages principaux, comme les 
                      simples figurants (par exemple les autres prisonniers), 
                      ne cessent de jouer avec leurs doigts, comme s’il leur manquait 
                      quelque chose... Une cigarette. C’est comme s’ils voulaient 
                      vivre, et qu’ils en étaient chaque fois empêchés.