Dimanche
16 mai
Grasse matinée obligatoire. Aujourd’hui, jour de Monsieur
Chose, j’en profite pour me reposer. Je ne veux voir personne,
ne plus rien entendre. Mais à 22h, je sors. A la Quinzaine
des Réalisateurs : Fever, d’Alex Winter, un thriller mental
qui se passe à Brooklyn. Ok, le film est parfaitement éclairé,
l’atmosphère très inquiétante, mais pour le reste, on l’oublie
très vite.
Lundi 17 mai
J’ai deux places qui me tombent entre les
mains à 13h30 pour la séance de 14h. Tant mieux, je voulais
voir le nouveau Atom Egoyan, Felicia’s Journey. Oui, d’accord,
comme à l’accoutumée chez le cinéaste canadien, une réflexion
sur la solitude, sur l’enfantement. Mais, insuffisant, tout
ceci est vite rattrapé par le surfait des mouvements et du
montage. En sortant de la projection, je parviens à me glisser
dans le centre de presse. Ici, ça fourmille, ça papote. Je
retire le maximum de dossiers de presse, de photos et de diapositives
sur les films. Un sacré gros paquet ! En dernière chose, un
curieux paradoxe. D’accord, c’est beau, on fait des films
pour réclamer justice, tolérance, des films sur des êtres
simples, purs, abattus par un quotidien devenu invivable.
Et le soir venu, à Cannes, pour inaugurer le succès d’un film
sur la misère, où l’émotion rattrape facilement la sincérité,
la production concernée donne une grande fête sur la plage
: on s’empiffre, on fait la cour (courte) à des potiches spécialement
recrutées pour leur poitrine généreuse, et on se fout du monde
et du moindre individu malheureux. Le droit à la sensibilité
ne serait-il qu’une exclusivité du pouvoir ? A voir, à méditer...
D’ailleurs à 22h, projection à Un Certain Regard de Garage
Olimpo, sur la dictature en argentine de 76 à 84. Sokourov
nous dit à propos de Moloch, que n’importe quel pouvoir est
un Moloch en puissance. Le nom de Moloch étant attribué au
plus vaillant des guerriers de Satan dans la guerre qui l’oppose
aux armées du ciel : ah, le pouvoir...
Mardi 18 mai
A 11h30, en compétition : L’humanité de Bruno Dumont. Douteux,
lent, le cinéaste de La Vie de Jésus cherche à ausculter les
corps en prenant son temps, mais sans jamais vraiment toucher
au coeur. Il pose sa caméra au milieu d’un champ et il attend...
il attend... Tout ceci sent un peu le roussis : en un mot,
la fainéantise. Le document falsifié. Parfois, la poésie peut
être trahi. Bon sang, mais est-on encore capable de monter
à notre époque des films fracassants, impossibles à cerner ?
A ne pas montrer ce qui nous entoure mais à révéler la réalité
d’un être, autant toute sa violence que tout son amour ? L’humanité
devrait sortir le 29 septembre. A chacun son avis ! Sinon,
mis à part ça, je fatigue, je fatigue... A 22h, Les Passagers
de Jean-Claude Guiguet pour Un Certain Regard. Quel navet
! J’ai pas vu pire démonstration cinématographique depuis
longtemps. Peut-être les films de Max Pecas. Et encore, lui,
au moins, il le fait exprès. Ici, Guiguet veut nous donner
une leçon de morale. Qu’il est brave ! Dans ces cas-là, j’imagine
toujours le producteur qui va chercher de l’argent avec un
script aussi mauvais que celui-là. Il arrive à rassembler
10 millions de francs. Le film nous demande de penser à l’être
humain, perpétuellement mis en danger par les progrès technologiques.
Quel manque de tout. Et en plus, Guiguet ose mettre une musique
de Léo Ferré d’après le Spleen de Baudelaire pour accompagner
ses images, d’une médiocrité rarement atteinte cette année
malgré le nombre de décevants spectacles cinématographiques
du festival. Terrifiant ! Les films : pour apprendre à en
faire, il faut apprendre à ne plus en voir. Enfin, certains...
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