Mercredi
19 mai
Ghost Dog : la voie du samouraï de Jim Jarmusch
met un peu de piquant dans la sélection officielle. Forest
Whitaker est magistral. Le film, noir, avec quelques touches
d’un humour dont raffole Jarmusch, nous conte l’histoire
d’un tueur fidèle aux pratiques des samouraïs qui se venge
à (l’ancienne) de mafieux italiens qui souhaite l’exécuter
après un contrat qui lui ont commandé. Enfin, un bon moment
passé dans ce festival. Et même si ce n’est pas le meilleur
Jarmusch. Le dernier bon moment remonte à Moloch. L’après-midi
sera agréable. J’efface définitivement le mauvais souvenir
d’hier soir... que je veux oublier à tout prix. A n’importe
quel prix, d’ailleurs. Je profite de la plage pendant deux
heures à l’extérieur de Cannes, au calme, sans tempête. Pour
22h, un film annoncé comme un OVNI expérimental : The Blair
Witch Project regroupe trois jeunes étudiants qui partent
quelques jours dans la forêt tourner un documentaire sur une
sorcière (légende?) qui hante les lieux. On veut nous faire
croire à une histoire vraie, d’après des rushes retrouvés.
Alternant entre prises de vue vidéo et prise de vue 16mm en
noir et blanc, les deux metteurs en scène, présents à la séance,
nous livrent des mouvements maladroits pour donner à l’ensemble
une vérité qu’on ne peut truquer. Bref, un authentique réalisme.
Toute l’histoire est entièrement inventée. C’est plus une
sorte de film de fin d’étude qu’une véritable innovation dans
son genre. Malgré tout, il est intéressant de voir qu’une
image 16mm gonflé en 35 apporte aux visages une grandeur d’âme
spéciale qu’on ne trouve pas sur une image tournée en 35 directement.
Le grain granuleux laisse les corps flotter dans un brouillard
épais auquel l’émotion s’ajoute avec virtuosité.
Jeudi 20 mai
11h15. Nos Vies Heureuses de Jacques Maillot est le seul premier
film français en compétition. Auteur de Corps Inflammables,
Prix Jean Vigo 94 du court-métrage, Maillot suit le destin
de six personnages en quête d’eux-mêmes. Produit par Margouric
(Laurent Bénégui), qui a notamment lancé Agnès Obadia, Alain
Beigel, etc... Nos Vies Heureuses rassemblent tous les thèmes
favoris des films français en général : un personnage qui
devient homosexuel, un autre qui meurt, des femmes perdues,
d’autres qui s’éclatent. Bref, ce qui devient pénible à force.
Au bout d’une heure, les personnages deviennent agaçants,
à pleurer comme des larves sur leurs petits états d’âmes respectifs.
L’histoire n’aboutit jamais. On croirait regarder une vingtaine
de petits courts métrages rassemblés en 2h25. En rentrant,
je me regarde dans le miroir. Mes yeux commencent à devenir
d’un rouge inquiétant. Faut que ça s’arrête. Je ne voudrais
pas ressembler à François Chalais, critique antique, que j’ai
croisé il y a peu de temps et qui m’a foutu une vraie trouille
avec ses yeux globuleux (globules rouges évidemment). Avec
ça, c’est sûr, on ne peut pas voir les films avec un regard
subliminal... A 22h, je m’apprête à aller voir Summer of Sam,
le dernier Spike Lee présent à la Quinzaine. Malheureusement,
une file d’attente interminable me décourage. Je me demande
parfois à quelle heure viennent les gens... Pour garder le
sourire, je demande à quelqu’un pour quel film il fait la
queue. Il ne sait plus, mais c’est un film. Voilà à quoi se
résume la bêtise par ici...
Vendredi 21 mai
J’hésite. Je veux rentrer. Mais il reste
le film de David Lynch, The Straight Story. Allez, encore
un petit effort. A mon arrivée vers 10h devant le palais des
festivals, j’obtiens une place pour aller voir les courts
métrages en compétition. Pour atteindre la salle, il faut
aller à l’intérieur du palais. Donc, je pénètre dans le centre
de presse pour la seconde fois. Je retire les dossiers et
les diapos des films qu’il me manque, puis je tombe juste
sur l’arrivée de David Lynch, qui doit donner une conférence
de presse autour de son film.
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