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  Song Hae-sung réalisateur de Failan (c) Nicolas DESPRES et Nicolas MICHEL
Par ailleurs, c’est un film coréen qui a officiellement ouvert le bal de la grande soirée d’inauguration du festival. Ce long métrage intitulé Musa le guerrier (2001) de Kim Sung-Soo, est la plus grosse production nationale (7 millions de dollars) depuis l’avènement du cinéma coréen. Une fresque spectaculaire et divertissante, sans grand intérêt artistique, qui témoigne cependant du savoir-faire coréen en matière de cinéma grand spectacle. Déluge d’action, fragmentation de gros plans en mouvement, montage syncopé… Christophe Gans aurait pu venir prendre une grande leçon de chorégraphie. Bien que très culturellement ancrée, cette fresque médiévale peut s’aligner sans complexe face aux grosses machines américaines qui n’ont pas totalement envahies leur box-office. Effectivement, la part de marché de leur cinéma national ferait assurément pâlir de jalousie nombre de pays occidentaux.

Enfin, l’illustre et logique reconnaissance a été attribuée à ce pays avec le film Faillan (2001) de Song Hae-sung quadruplement primé : Lotus du prix du public, Lotus du meilleur acteur, Lotus du meilleur réalisateur et meilleur film. Un long métrage original qui, sans être un chef-d’œuvre, illustre néanmoins la maîtrise narrative de ce cinéma innovant, captivant et imaginatif.

Rien ne vient infirmer ce qu’il était déjà aisé de constater en France lors des sorties sur nos écrans de L’Ile (2001) de Kim Ki-duk ou encore de Pepermint Candy (2002) de Lee Chang-dong. La force du cinéma coréen se révèle dans son goût pour l’aspect littéraire que peut revêtir la forme cinématographique, alliée à un réalisme poétique féroce. Ce cinéma qui se cherche encore artistiquement et commercialement en revisitant les genres et en subissant l’influence de ces voisins asiatiques, finit par imposer de réels créateurs.



LA COMPETITION

Peony Pavilion (c) D.R.

Au programme de la compétition, six longs métrages. Peony Pavilion (2001) de Yonfan représentait Hong Kong. L’histoire d’une passion non consommée entre deux femmes, Suifan, célèbre chanteuse d’Opéra, cinquième épouse délaissée du Seigneur Rong, et Lan, une ancienne de ses admiratrices. Hommage rendu à la femme et à ses multiples facettes, le cinéaste se joue de l’ambivalence de ses deux personnages, une épouse faible, vulnérable, bannie, malade (Suifan) et une femme forte, dominatrice, travestie, socialement établie (Lan). Le rendu plastique de l’image (Lotus de la meilleure image) retranscrit la sensualité de la Femme, les nombreuses séquences mettant en avant la nature rythment l’enchaînement des saisons et décomptent l’inéluctable destin de Suifan.

Deathrow (2000) de Joel Lamagan, long métrage philippin, retrace l’histoire d’un adolescent des bidonvilles qui est accusé et condamné pour meurtre alors qu’il est innocent. Directement intégré au sein du couloir de la mort, un ancien criminel choisi de devenir son protecteur. Un film " social " qui dénonce ouvertement l’existence de la peine de mort aux Philippines, la justice expéditive, les rouages carcéraux (drogues, viol, corruption, violence, suicide, condition de vie, …), mais qui n’offre aucune nouveauté cinématographique et scénaristique. Le message est intéressant, mais la forme et le contenu réchauffés le ridiculisent.

A Woman’s Work (2001) de Kentaro Otani est une comédie qui aborde la relation des couples au Japon. Ici, les femmes sont dominatrices et les hommes dominés. Ce film " intimiste " japonais qui souligne une pensée ironique de la condition féminine souffre incontestablement de longueurs trop flagrantes.

  Shin Sang-ok (réalisateur coréen et Président du Jury du festival 2002) (c) Nicolas DESPRES et Nicolas MICHEL

The rule of the game (2001) de Ho Ping narre l’existence de Turtle, citoyen taïwanais quelconque qui décide de tuer Will, sournois personnage, avec l’aide de son ami Chewy. La construction narrative (Lotus du meilleur scénario) est onctueusement menée, Ho Ping ne cesse de jouer avec les (fausses) attentes du spectateur ; les dialogues et les situations " tarantinesques " nourrissent le film d’une extraordinaire touche de second degré. L’Indonésie était représentée par un long métrage pictural, Whispering Sand (2001) de Nan T. Achnas qui dévoile l’histoire de Daya, une jeune femme abandonnée par son père et perpétuellement submergée par l’obsessionnel amour de sa mère. Entre rêve et réalité, sensibilité et dureté, volupté et avidité, Daya recherche son père. Mais la beauté physique est handicap dans les milieux précaires pour qui veut préserver son innocence d’enfant. Un film aussi beau que cruel, un hommage à la femme (Lotus de la meilleure actrice) et à la nature... Enfin, le long métrage Failan (2001, Corée) de Song Hae-sung, quatre récompenses (Lotus du prix du public, du meilleur acteur, du meilleur film et du meilleur réalisateur), conte l’histoire d’amour d’un couple qui ne s’est jamais rencontré. Faillan est une jeune chinoise qui débarque en Corée. Pour travailler, elle doit se marier. Kang-jae, un bon à rien, accepte et, en quelque sorte, lui vend son nom. Sans se rencontrer, ils forment un couple. Mais Faillan décède, Kang-jae décide d’aller inhumer le corps de sa femme. Petit à petit, il découvre la vie de son épouse et tombe amoureux. Un film tendre qui n’est pas sans nous rappeler certains opus de Takeshi Kitano. A l’absurdité de la situation répond une réelle cause sociale. D’un point de vue cinématographique, tous les supports visuels (cinéma, vidéo, écran de télévision) traduisent une importance narrative. L’architecture du récit et l’orchestration des strates temporelles dévoilent une indéniable modernité. Un film qui, sans grande prétention, surprend, plaît, et démontre à quel point le cinéma asiatique s’anime d’une incontestable modernité.