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PANORAMA ECLECTIQUE ?

Metropolis (c) D.R.

Il convient de constater que l’Inde était la grande absente de ce festival. Les organisateurs du festival nous ont toutefois concocté un bouquet diversifié dans la section Panorama allant jusqu'à programmer deux films d’animation japonais. Cependant, loin de nous l’envie de nous attarder sur Métropolis (2001) de Rintaro et Patlabor WX III (2001) de Takuji Endo qui reprend la suite de la saga crée par Mamoru Oshii (monsieur Gosth in the Shell). Pourquoi ? Parce que ces films sont consacrés chef-d’œuvre par les adeptes du genre avant même d’être vus… Et pourtant nous n’avons rien vu de très convainquant dans ces applications de vieilles recettes usées jusqu’à la corde.

Notre attention s’est plus particulièrement portée sur les films chinois et vietnamiens. The Mariage Certificate du Chinois Huang Jianxin est une comédie douce-amère où les affres de la vie familiale croisent les absurdités d’un régime bureaucratique… A la question : si on perd son certificat de mariage est-on toujours marié ? la réponse se fait attendre pour le plus grand plaisir du spectateur… La frénésie obsessionnelle d’une mère qui coure après une paperasse insaisissable s’oppose à la placidité d’un père de famille sympathiquement prit par le démon de midi. Ce film va parfois jusqu'à revêtir les aspects d’une comédie à la Woody Allen. La fantaisie prend bien et notamment lorsqu‘elle est poussée à son comble dans des flash-back d’animation.

  Phantom Queen (c) D.R.

La famille est aussi un thème au centre des préoccupations du vietnamien Dang Nhat Minh qui après plus de dix longs métrages à son actif signe le très beau la Saison des Goyaves. On regrettera seulement que le scénario veuille trop explicitement nous arracher des larmes. A cinquante ans, Hoa pose régulièrement dans l’atelier de l’école des Beaux-Arts de Hanoi. Dans son enfance, au sein d’une grande maison entourée d’un jardin où trônait un goyavier, il vivait avec sa famille. A l’âge de treize ans, il tombe de cet arbre. Son âge mental se fige. A la libération, la réforme immobilière oblige Hoa et sa famille à quitter leur demeure. Presque quarante ans plus tard, Hoa qui vit avec sa sœur dans un petit appartement est obsédé par le désir de retourner dans cette vieille maison pour prendre soin de " son arbre ". Par l’intermédiaire de ce personnage bouleversant, Dang Nhat Minh nous interpelle et nous questionne sur la place de l’idiot au sein de nos sociétés. Avec une grande maîtrise poétique, ce film souligne l’incompatibilité entre l’imaginaire d’un arriéré mentale et la dure réalité, tout réveillant un dialogue entre les blessures du passé et un présent sans repères. Même si nous sommes parfois proches du misérabilisme, ce film reste un drame social poignant, qui pose un regard nuancé sur la société vietnamienne actuelle.

En revanche, nous ne nous attarderons pas sur le second film chinois intitulé All the way (2000) de Shi Runjiu qui ne doit sa présence au sein du Panorama qu’à la prestation de Karen Mok. Un road movie inégal, dépourvu de substance qui dévoile d’un thème déjà mille fois traité.

Nous regretterons de ne pas avoir vu Les larmes du tigre (thailande, 2000) de Wisit Sasanatieng, un western, et le film coréen, Address Unknown (2001) de Kim Ki-duk, un drame social violent et cru qui semble avoir interloquer de nombreux spectateurs et la majeure partie des organisateurs.



PERLES DU PATRIMOINE

Eunuch (c) D.R.

Parmi la rétrospective dédiée à Shin Sang-ok, un long métrage majeur nous a ébloui. Il s’agit de Eunuch (1968) qui, durant la dynastie Chosun, dépeint la claustration des divers résidents du Palais Royal. Loin des rivalités politiques, des luttes de pouvoir, se cachent des animosités personnelles, intimes, tantôt physiques, tantôt psychologiques, souvent malveillantes et communément inhumaines. L’amour, la haine et le désir sexuel hantent les quartiers interdits de la royauté coréenne. L’égoïsme de l’homme et l’emprise claustrophobique règnent à l’encontre de la sagesse féminine et des libertés individuelles. Film de genre, drame historique, une des composantes les plus proéminentes de l’œuvre de Shin Sang-ok : l’histoire mythologique et la culture traditionnelle de la Corée, brosse le portrait d’une institution royale pour le moins cruel. Chaque protagoniste est écrasé par le protocole d’usage, les épouses (contraintes) doivent assouvir les sollicitations du Souverain. Les eunuques, soumis en bas de l’échelle tyrannique du régime, ne peuvent divulguer ou proclamer leur désir qui pourtant existe. Toutefois, malgré ce sectarisme suranné, des concupiscences implacables naissent, mais restent cachées car l’existence de ces secrets ne peut sortir du Palais. Une œuvre d’un immense accomplissement classique et esthétique. La couleur " passée " de la pellicule assène une touche plastique nostalgique et typique aux films des années 60. Le dispositif et la mise en scène (cadrages et surcadrages) nous remémorent la méticuleuse méthode filmique de Yasujiro Ozu. La théâtralité omniprésente est poussée à l’extrême par un jeu d’acteur posé, maniéré à la limite de la caricature. Mais nous acceptons volontiers ce compromis et nous laissons désabuser par les infortunes de tous ces personnages prisonniers de ce fatal huis-clos.