Le secteur distribution de l’industrie
cinématographique se porte beaucoup mieux. En ce qui
concerne la distribution des films, l’Observatoire européen
de l’audiovisuel observe une grande stabilité. Les
entreprises à capitaux européens et les filiales
de sociétés américaines présentent
chacune des marges bénéficiaires positives,
avec un léger avantage pour les sociétés
européennes. Pour l’édition et la distribution
vidéo, le rapport de forces s’inverse. Les majors américaines
contrôlent en effet trente des cinquante premières
entreprises du marché européen. L’édition
et la distribution vidéo sont depuis 1999 la branche
la plus performante de l’industrie cinématographique.
Et cela n’est pas près de changer vu la folie consumériste
qui entoure à l’heure actuelle le DVD. (1)
Laissant aux participants le soin de consulter ces chiffres,
Wolfgang Closs s’est attardé sur les aides publiques
accordées au cinéma européen et qui malgré
une augmentation de 45% entre 1997 et 2001 n’ont pas permis
d’améliorer les résultats des branches production,
exploitation et distribution, comme on a pu le voir plus haut.
Pourtant le système d’aides publiques européen
est dense. " En Europe, il existe 147 organismes
de financement couvrant 27 pays. Ces organismes ont mis au
point 519 programmes d’aides pour un total de 1,2 milliards
d’euros ", détaille Wolfgang Closs. Mais
visiblement cela ne suffit pas.
D’après Faruk Gunaltay, président
du groupe promotion d’Eurimages, "pour faire vite un
film européen aujourd’hui, c’est un film américain ".
Pour argumenter ce bon mot volontairement provocateur, il
cite le cas d’Harry Potter et la chambre des secrets
: " Avec 20 % des salles françaises diffusant
ce film américain la semaine de sa sortie, peut-on
encore parler de diversité culturelle ? ".
En 2002, le premier épisode des aventures du petit
magicien à lunettes avait déjà réalisé
5,6% du nombre total d’entrées en Europe, soit plus
que les 4,3% d’entrées obtenus pendant la même
période par tous les films allemands réunis.
Cependant, les cinémas français et allemand
ne sont pas les plus à plaindre. Avec une production
nationale représentant en 2002 respectivement 39% et
16% (soit six points de plus qu’2000) du nombre d’entrées
national, la France et l’Allemagne s’en sortent plutôt
bien. Les films espagnols avec 27% du nombre d’entrées
(alors qu’ils stagnaient autour de 13% dans les années
80), italiens avec 16% (ce qui constitue une forte baisse),
anglais avec 15% font eux aussi de la résistance. Mais
comme le souligne l’Observatoire européen de l’audiovisuel
dans son enquête, ces cinq pays sont des privilégiés
au niveau européen. Ils se partagent 77% du volume
total des aides publiques accordées à l’industrie
cinématographique. A elle seule, la France a alloué
plus du tiers de l’ensemble des aides disponibles dans les
vingt-cinq pays européens étudiés.
Pour les autres pays, ceux d’Europe
Centrale et d’Europe de l’Est, la situation est bien pire.
" Sur l’année 2001, le nombre d’entrées
des films d’Europe Centrale atteint 0,05% du nombre d’entrées
total en Europe ", a rappelé Wolfgang
Closs. Autant dire que pratiquement personne ne les a vus.
Quelques minutes auparavant, Luciana Castellina avait déjà
souligné l’état déplorable de l’industrie
cinématographique dans ces pays dont un certain nombre
rentrera dans l’Union européenne à l’oraison
2004. " La pénétration du cinéma
américain est particulièrement forte dans les
pays d’Europe de l’Est, où les films made in Hollywood
dépassent 90% du nombre total d’entrées ",
a rappelé la parlementaire européenne en citant
l’exemple de la Hongrie. (2)
Beaucoup d’intervenants ont donc souligné les difficultés
actuelles du cinéma européen. Gaetano Stucchi,
de Media Consultant, a lu un rapport d’un colloque qui s’était
tenu à Turin les 14 et 15 novembre dernier au sujet
de la sauvegarde des archives nationales comme celles de l’INA
ou de la BBC. Qui seront gravement mises en péril sans
une aide rapide des pouvoirs publics nationaux ou européens.
Jorge Bosso, porte-parole de la Fédération internationale
des acteurs ( Eurofia ), a déploré " le
statut précaire des comédiens en matière
de droit social, de sécurité ou de santé ".
Il a critiqué le système de quotas d’artistes
nationaux qui serait l’une des causes de la non-vision des
films européens en dehors des limites de leur pays
de conception.