Pickpocket de
Linton Semage
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Pickpocket
est le deuxième long-métrage de Linton Semage,
après Padadaya, réalisé en 1999
et montré alors dans de nombreux festivals internationaux.
Le cinéaste sri lankais (par ailleurs, acteur, mime
et danseur), interprète lui-même le personnage
principal de son film, un pickpocket mutique et solitaire
vivant sur le malheur de ses victimes, des familles aussi
misérables que la sienne. Un jour, il trouve la photo
de sa femme dans un des portefeuilles qu’il vient de voler.
Il n’aura alors de cesse de chercher son propriétaire.
Les rapports avec sa femme, qui le pousse à arrêter
ces vols à la tire, se dégradent peu à
peu. Ces relations sont véritablement au centre d’un
film qui repousse dans son hors champ le spectaculaire des
vols annoncés par le titre. En cela, ce film n’est
absolument pas bressonnien comme on aurait pu le soupçonner
innocemment à l’origine. Ce Pickpocket un peu
sec traîne par contre de languides énigmes (on
ne comprend pas toujours toutes les liens entre les différents
personnages) dans une atmosphère oppressante.
Klassenfahrt de
Henner Winckler
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La mélancolie
du garçon qui n’avait pas vécu et qui avait
peur de vivre. Ronny, le moineau adolescent, traîne
sa nonchalance dans la grisaille des rives de la mer Baltique
hors saison. Solitaire au milieu d’un groupe, une classe d’élèves
pas forcément exaltée par les mornes matches
de ping-pong et les promenades glaciales en bord de mer… Comment
se révéler face aux autres, face à une
jeune fille qui cache ses sentiments derrière des moues
boudeuses ? Comment se révéler à
soi-même ? Quand Ronny courtise Isa, une élève
de sa classe, c’est presque par défaut, tant il paraît
mystérieusement extérieur à lui-même.
Plus il bouge, plus il patine sur-place. C’est Steven Sperling
(ado trouvé dans la rue, lors d’un casting sauvage,
par le cinéaste) qui prête son corps frêle
et ses yeux fuyants à ce drôle de mec dont le
moindre mouvement est susceptible d’engendrer l’inattendu,
à l’instar de cette surprenante danse de sioux (ou
supposée telle) qu’il entame lors de la visite d’un
musée. Henner Winckler, nouvelle révélation
du cinéma allemand (qui semble frémir de bonnes
surprises ces temps-ci) privilégie silences et frôlements
et dissimule la violence des sentiments en signant un film
faussement tranquille.
COURTS METRAGES DE FICTION
/ DOCUMENTAIRE
Du panorama présenté, nous retiendrons une
nouvelle fois l’exigence d’une sélection encline à
présenter les différentes facettes du champ
de la modernité cinématographique. Beaucoup
d’objets étranges, inventeurs de nouvelles formes ou
imperméables à toute émotion facile étaient
proposés. On retiendra notamment Murs d’Emmanuel
Saget, redessinant la topographie imaginaire et intime des
liens qui relient un fils à sa mère, To sit
in a wardrobe, court métrage russe en noir et blanc
travaillant une bande-son tarkovskienne, Antoine travaille
de Philippe Chapuis (Grand Prix au festival d’Angers 2002),
relatant entre rêve et réalité les soirées
étranges d’un étudiant veilleur de nuit dans
une usine, ou encore La chatte andalouse, court métrage
divertissant et roublard de Gérald Hustache-Mathieu,
dressant le portrait d’une jeune religieuse sculpteuse de
bites (!)...
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Davantage de déceptions
au sein de la section Documentaire, hormis Paisagem,
court-métrage portugais d’une petite vingtaine minutes
absolument splendide. Renata Sancho s’est inspiré d’un
roman de Carlos de Oliveira, Finisterra - Paisagem e Povoamento
(à paraître dans une traduction française
aux éditions du Passage du Nord Ouest en mars 2003)
pour en tirer une "substantifique moelle" sensuelle
et lyrique : pour cette première partie d’une adaptation
qui en comptera plusieurs, elle choisit en effet dans un premier
temps de se concentrer uniquement sur les paysages et les
atmosphères du roman. Paisagem est à
l’arrivée un film aussi modeste que terrassant de beauté,
composé de plans super 8 gonflés en 35 mm invitant
à la brève contemplation de paysages aussi physiques
que mentaux (la mer, les roseaux, des étendues désertiques,
oiseaux et autres grenouilles...) nourris d’une bande son
extrêmement travaillée. Avec Paisagem,
Renata Sancho lave notre regard et réinvente le désir
originel de cinéma. Douce sensation de voir des images
de cinéma comme si c’était la première
fois de sa vie.
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