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Hou Hsia Hsien (c) D.R.

Charles Tesson se réjouit de voir un public si vaste, annonçant qu'un symposium Jean Renoir à Paris n'attirerait sûrement pas une telle foule. Ses observations rejoindront celles de Pedro Costa; Ozu est un cinéaste que l'Europe découvre dans les années 70; d'une part on reconnaît le maître, d'autre part, le climat socio-politique de l'époque rend difficile d'accepter l'œuvre dans sa totalité, la famille étant durant ces années un obstacle majeur à franchir, à transformer, en tant qu'incarnation d'une société appelée a sa destruction. Enfin, on touche à un débat possible, qui sera vite éteint par les modérateurs. Il reprendra aussi l'observation de Kiju Yoshida, sur la position militaire d'Ozu: dans les années trente, Ozu tournait souvent à Ginza, période à laquelle les militaires étaient présents sur toutes les rues. Or, pas un seul uniforme, jamais, dans les films d'Ozu de cette période. Kiju Yoshida faisait cette remarque en rappelant que le Premier ministre Junichiro Koizumi s'apprêtait à envoyer en Irak 1000 hommes des Forces de Défense du Japon, décision contestée par la majorité des citoyens japonais, cela trois jours avant ces images de Saddam capturé. Tesson reviendra enfin sur une autre thèse de Yoshida, évoquée par Manoel de Oliveira, autour de la séquence à la fin de Printemps Tardif, lorsque Setsuko Hara et Chishu Ryu, fille et père, font un dernier voyage ensemble avant le mariage de celle-ci, et qu'elle lui avoue vouloir rester avec lui, s'occuper de lui, voilà son bonheur. Yoshida y voyait l'inceste. Nous y reviendrons. Bref, Tesson cherche le dialogue, mais Hasumi laisse peu de marge pour manœuvrer. Ce sera Hou Hsiao Hsien qui arrivera, à la toute fin, à donner un peu de vie à ce qui se transformait en « séance ».

Le critique Coréen, Lim Jae-Cheol, s'exprimant lui aussi difficilement en anglais, qui organisa la première rétrospective Ozu en Corée, rappelle la situation politique, les conditions de réception du cinéma japonais en Corée, longtemps interdit de distribution et diffusion. Les portes commencèrent à s'ouvrir à la toute fin des années 90, et l'on peut compter aisément le nombre de films japonais exportés vers la Corée. Les feuilletons télé japonais en revanche ne rencontrent pas cette forme d'interdit. Comment parler d'Ozu en Corée ? En balayant l'enjeu national. Ozu est un immense cinéaste, un maître, discutons de son œuvre sans évoquer le Japon : la forme, la construction, la structure, les thèmes... mais pas de Japon. M.Hasumi, lui-même organisateur de rétrospectives Seijun Suzuki à Locarno et Kato Tai à San Sebastian (signe que de l'étranger, il n'y aurait qu'un seul critique et théoricien au Japon), demandera en conclusion à Lim Jae-Cheol quel fut l’accueil de ces mêmes cinéastes culte en Corée, qui firent l'objet d'une autre rétrospective montée par M.Jae-Cheol. Cette fois c'était plus simple, les films de Suzuki et Tai ne sont même pas considérés comme des films, mais comme des objets de la pop culture japonaise, ce que l'Etat admet, ne voyant rien de politique chez Suzuki et Tai !