Difficile en
effet de justifier la lâcheté du personnage de Stéphane
Freiss. Et à revoir le film de François Ozon, on ressent
encore plus le cynisme de cette vision du couple, au jour
le jour.
« Je pose des questions sur la vie de couple en
filmant des gestes et des paroles, comment des choses anodines
peuvent prendre une force plus tard.
L’effet de distanciation que connaît le spectateur, le personnage,
lui ne le connaît pas. Et de la même manière, le tournage
des comédiens qui s’est fait de façon anachronique. Ozon,
le manipulateur, se dévoile : « Mon parti-pris
était de rendre plus ambigu les scènes pour s’identifier.
Au spectateur de faire les traits d’union ! »
Valéria Bruni-Tedeschi, à l’affiche du prochain film
d’Ozon (Le temps qui reste), dont le tournage est
déjà terminé, prend alors la parole pour conclure la séance : « Selon moi, je crois que les personnages que nous
jouons, c’est nous-mêmes. Mais à chaque fois, on va s’intéresser
sur une partie de soi spécifique. Le regard d’un réalisateur
est essentiel : sa manière de me regarder me fait changer.
Comme dit Pirandello, « Je change selon le regard
de la personne. »
"Plein de petits rois
autour de ma reine"
Si on demande à Arnaud Despleschin
la signification du titre de son nouveau film Rois et
reine, il explique d’un ton presque tendre: « c'est
plein de petits rois autour de ma reine », faisant
référence à Emmanuelle Devos si lumineuse dans ce film.
L’hommage se poursuit lorsque Desplechin ajoute: "Emmanuelle
a coréalisé le film avec moi d’une certaine façon";
L’intéressée rougit tout en faisant un geste négatif de
gêne et de plaisir a la fois.
"Ce qui est magnifique c’est l’abandon, précise
E. Devos. Cela se fait comme ça; j’ai remarqué que les
bons rôles se faisaient toujours sans préparation."
Ses acteurs, que Desplechin semblent vénérer ("pour
moi Emmanuelle et Matthieu sont les vraies stars du cinéma
français), composent dans Rois et Reine de
bien curieux personnages, où le rire, l’émotion violente
voire la folie guettent tôt ou tard nos deux héros qui se
croisent, s’évitent et se retrouvent tout simplement par
la présence d’autres personnages liens, comme celui de Catherine
Deneuve qui interprète ici une psychiatre de poigne :
"la seule actrice capable de tenir tête a Matthieu
a l’écran", souligne le réalisateur, tout sourire.
Desplechin cite alors Truffaut en faisant référence à Catherine
Deneuve : "C’est toujours très agréable de travailler
avec des gens intelligents."