Un intermittent est une espèce
en danger. Un peu comme le koala. Et l'Homme est responsable
de cette situation précaire. Oh, pas n'importe quel homme
! Il s'agit de l'homo droitus de l'époque raffarienne,
espèce assez contradictoire dans ses avis pour considérer
que les intermittents sont des parasites sociaux tout en
leur demandant de ne pas interrompre les festivals auxquels
ils participent, parce que paraît-il - ô surprise - ces
spectacles rapportent de l'argent aux municipalités qui
les accueillent. Bien sûr, à Cannes, les intermittents étaient
un peu ridicules vu leur tout petit nombre à manifester.
On était loin - mais alors très loin - de la foule hurlante
devant se déverser sur la Croisette. Cependant, avec leur
énergie, avec leur envie de défendre une cause syndicale
mais aussi une certaine idée de la culture, les intermittents
avaient une dimension indéniablement sympathique.
Intermittents
Les intermittents ont le sens
du spectacle. L'inverse serait inquiétant pour eux, n'empêche
qu'ils ont su tout au long de leur mouvement trouver des
moyens d'actions joliment visuels. Cela ne sert peut-être
à rien, mais ça change des grèves prises d'otages qui ont
rarement débouché sur autre chose que des échecs cinglants.
Alors vive la contestation, vive la révolte, mais vive l'intelligence
dans la contestation et la révolte !
Intermittents
De voir la colère derrière les palmiers,
plusieurs Cannois se sont sentis attaqués dans la droititude.
Il fallait lors des manifestations d'intermittents les réflexions
acides de rombières en tailleur Chanel : "Ils ne savent
même pas ce que veut dire le mot travail !", "Toujours
à se plaindre, est-ce que je me plains moi !"...
Certes, beaucoup de gens côtoient dans leur plus ou moins
proche entourage un intermittent qui se sert plus des Assedic
comme plan épargne glande que comme une bouée de sauvetage
en attendant que son art paie. Pourtant, même s'il y a des
abus de quelques-uns de ses membres faut-il pour autant condamner
toute une catégorie d'individus ? Les prêtres ne sont pas
tous pédophiles, les politiques pas tous des pourris, les
patrons pas tous des salauds vendus au grand capital et les
intermittents pas tous des parasites sociaux. Il ne faudrait
pas oublier le rôle joué en France par la culture, son importance
dans la cohésion de notre société ou dans le rayonnement de
notre petit Hexagone dans le monde entier. Les intermittents
participent à cet élan national, ils en méritent au moins
le respect si ce n'est la compréhension.