Intégrer le spectateur. Voilà
une des forces du cinéma hollywoodien. Parce que si
faire participer le public peut paraître évident,
surtout dans l’art cinématographique, encore
faut-il savoir s’y prendre. Mais quoi de plus naturel
à Hollywood ? Sinon l’"entertainment". C’est-à-dire
inscrire le film dans une relation étroite avec le
spectateur. Tenir compte de ses réactions. Le détourner
de son quotidien, de ses problèmes. Le faire rêver.
En définitive, le transporter ailleurs. Dans des films
de science-fiction, des westerns ou des films d’aventure,
par exemple. Tournés dans de gigantesques décors
naturels ou artificiels, ils offrent la galaxie sur un plateau,
les plaines ou les océans à perte de vue. A
travers 2001 : L’Odyssée de l’espace,
Danse avec les loups, ou encore Waterworld,
Hollywood propose des espaces à n’en plus finir, et
qui ne révèlent toute leur splendeur que sur
grand écran. Il s’agit de présenter au spectateur
un univers dans lequel il puisse voyager en toute tranquillité,
et pourquoi pas s’identifier au héros. Cela, suivant
qu’il se sente dépaysé ou rassuré. Pour
ce faire, les américains tirent tour à tour
profit de leur sens du spectacle, de leur géographie,
de leurs capacités de production et, last but not
least, de leurs moyens financiers. Et finalement, comme
le résultat fonctionne, Hollywood utilise, presque
jusqu’à la limite du possible, le moule correspondant.
A savoir, la superproduction. Mais dans tout ça, on
finit par se demander qui influence qui. Schématiquement,
le 7ème Art influe sur le public par sa nouveauté,
quand il apparaît. En ce sens où les spectateurs
adhèrent, naturellement et presque naïvement,
à une certaine vision du cinéma. Tout simplement
parce qu’ils n’en connaissent pas d’autre. Or, petit à
petit, tandis qu’Hollywood soumet des films au public, ce-dernier
montre des préférences, prend des habitudes,
etc. Mais pas de panique... le box office s’occupe de tout.
C‘est-à-dire qu’il influence la production. Exploitant
le filon, tout à fait légitimement d’ailleurs,
ladite production satisfait ledit public, tout en y trouvant
son compte financièrement.
La morale de cette histoire, celle qu’Hollywood cherche à
véhiculer, c’est que tout le monde est content. L’autre
morale, la vraie, c’est que forte de tous ces atouts, Hollywood
propulse le spectateur dans un rêve l’espace d’un film.
Certes. Mais elle plonge parallèlement producteurs,
réalisateurs et acteurs au beau milieu de l’usine.
Notamment par la comédie musicale parce qu’elle a sans
doute été le genre le plus lié aux
Studios. Plus généralement par les stéréotypes
d’un cinéma de plus en plus pensé au superlatif.
HOLLYWOOD, UN CINEMA DE STEREOTYPES...
Très tôt sont
donc apparues des normes, sorte de rituels dont la présence
est plus ou moins constante d’un film à l’autre.
Ces stéréotypes, ou incontournables hollywoodiens,
sont notamment représentés par le happy end.
Largement utilisé pour les besoins de certains genres
comme la comédie musicale, il possède en outre
l’énorme avantage de faire presque l’unanimité.
Car il coupe court à toutes tergiversations éventuelles
concernant la morale, l’éthique, le contentement
ou non du spectateur, ou la réussite du film. Ainsi
le producteur sait qu’une fin heureuse favorisera le succès
du film, parce que la déontologie ne s’y trouve pas
attaquée. Et le spectateur, rassuré ou conforté
dans son rêve, rentrera chez lui content. De sorte
qu’il sera certain d’avoir investi sagement son argent.
Il deviendra ainsi un futur client potentiel. Ce qui n’est
pas pour déplaire aux producteurs. Cependant, si
le happy end fait le bonheur de certains, il peut être
un fardeau pour d’autres, en la personne des réalisateurs.
Raison pour laquelle il fait "presque" l’unanimité.
En effet, il est à même de les empêcher
de finir leur film comme ils l’entendent. Déjà
qu’ils ne maîtrisaient pas grand chose... Ainsi, Louis
B. Mayer changea, contre l’avis du metteur en scène,
la fin dramatique de Tess au pays des haines en happy
end.
Ce dernier est un moyen de rendre le public fidèle.
Soit. Mais lorsque l’on est assoiffé d’argent, rendre
fidèle ne suffit pas : il est nécessaire d’appâter,
de faire de la publicité. Et les effets spéciaux,
par exemple, seront parfaits dans ce rôle. Dès
les années 30, ils attirent du monde au cinéma,
avec la première version, riche en trucages, de King
Kong. Aujourd’hui, les spectateurs entrent grâce
à eux dans un monde irréel, magique, où
images et sons ne cessent de s’améliorer... Un vrai
rêve. En témoigne la trilogie de La Guerre
des étoiles, par exemple. A la pointe du progrès
technique, ils offrent maintenant au cinéma images
de synthèse et son numérique. Mais du même
coup, ils donnent l’occasion au public d’assister à
une féerie unique. D’autant plus qu’ils entretiennent mythes
et légendes, en ne manquant pas de leur octroyer
toujours plus de beauté et de crédibilité
: il suffit de regarder les différentes versions
de Dracula. En outre, l’histoire y est contée
sous forme du "Once upon a time ". Alors
là, on nage dans le bonheur...