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  Mulan (c) D.R.

L'aspect technique du cinérural n'est pas assuré par la section en elle-même, qui fait appel a une société itinérante (Kart'oon) mettant à disposition une liste de films dont ils possèdent les copies. La billetterie, gérée par Kart'oon, est contrôlée par le CNC qui veille à ce que la ventilation des recettes soit réglementaire. La périodicité mensuelle observée par le cinérural lui prodigue un statut événementiel (toute proportion gardée). Deux films par mois bénéficiant chacun d'une seule séance, projetés le même jour l'un à la suite de l'autre. Traditionnellement, c'est le samedi qui est choisi car il offre le plus de garanties de fréquentations. La première séance fixée a 18h30 est destinée aux enfants et exige une programmation en conséquence (comédies et animation). Celle de 20h30, réservée aux plus grands est aussi plus chère (35 francs contre 30 francs) et nécessite une programmation plus " adulte " (comédies et action). En gardant une fréquence mensuelle, la structure garantit sa survie en évitant lassitude et saturation. Mais il limite aussi les difficultés dues à son fonctionnement rudimentaire, qui élimine toute hypothèse d'une visée technique quelconque: ce n'est pas ici que le cinérural justifie son existence.


BENEFICIE D’UN FRANC, SUCCES


Il est bien évident qu'une telle structure, n'offrant pas des conditions optimales au spectateur, ne peut afficher un prix comparable aux salles traditionnelles. Oscillant entre 30 et 35 francs, le prix du billet paraît même un peu élevé. Il faut cependant considérer le mérite premier du cinérural : amener le cinéma en milieu rural. Les tarifs pratiqués sont d'ailleurs les moins chers envisageables puisqu'ils se situent en limite du seuil de rentabilité de la structure. Cédant la totalité des recettes-guichet à la société Kart'oon (la ventilation assurant ensuite une remontée aux ayant-droits), elle ne vit que de la vente de confiseries et boissons favorisée par les entractes forcés. La prestation de la société itinérante étant prise en charge par la municipalité, les maigres recettes alimentaires sont réinvesties uniquement dans l'affichage.

The Truman Show (c) D.R.

Nous le voyons donc, la structure est juste rentable et ne constitue aucunement une association à but lucratif. Sa viabilité économique dépend donc grandement de la fréquentation. Les responsables estiment à 50 entrées le seuil de rentabilité d'une séance. Tout en précisant que la séance consacrée aux enfants génère une meilleure recette, non seulement par une fréquentation plus massive, mais surtout par une consommation alimentaire plus grande. De plus, les enfants les plus jeunes étant généralement accompagnés, le nombre des entrées en est d'autant dopé.

Car le cinérural obéit souvent aux mêmes lois que le cinéma traditionnel et offre des caractères communs aux salles de province. La fréquentation varie selon le temps (la pluie décourage souvent le public), les périodes (les vacances scolaires profitent lorsque l'été nuit), les événements (le mondial 98 de football avait généré l'annulation pure et simple des séances prévues)… Mais elle varie aussi selon le type de film projeté, épousant la trajectoire générale: Walt Disney, les grosses comédies françaises, et globalement la production consensuelle génère les meilleurs scores et s'adjuge par conséquent la majeure partie de la programmation.

  Il faut sauver le soldat Ryan  (c) D.R.

Cependant, le film en lui-même n'importe pas toujours pour le public. Un certain type de spectateur, absent dans les salles traditionnelles a été engendré par la ruralité du site : la séance mensuelle attire la jeunesse adolescente en masse qui vient au cinérural comme on se rend au bal du village, pour s'y retrouver, rire et discuter. Dans ce cas, peu importe le film qui la plupart du temps n'est pas suivi : c'est le caractère événementiel (la sortie du mois …) qui prévaut sur l'objet en lui-même. Si ce type de public n'est pas du goût de tout le monde (trop remuant au regard des autres), il permet cependant dans sa fidélité de conserver une fréquentation rentable. Attirer, en plus du public classique, des spectateurs qui paient sans s'intéresser au film n'est-il pas une gageure qu'aimeraient relever bon nombre d'exploitants parisiens? Cependant, si la structure parvient à équilibrer sa balance commerciale, elle peut tout juste nourrir sa pérennité : les bénéfices réalisés lors d'une séance permettent uniquement de mettre en branle la prochaine et d'en assurer la promotion. Le cinérural ne paraît donc pas trouver sa raison d'être dans l'aspect économique.