LES
FILMS FANTASTIQUES ET LA SCIENCE-FICTION :
METAPHORES PLUS OU MOINS
SUBTILES D’UNE PEUR COLLECTIVE
La guerre froide ne modifie
pas les styles et les genres mis en place par l’industrie.
Cependant, certains genres se développent particulièrement
à cette époque. C’est le cas notamment des films
de science-fiction et du fantastique qui conviennent particulièrement
à l’actualité : peur et paranoïa sont
le terreau de ces types de film.
Invasion of the Body Snatchers, un film de 1956 réalisé
par Don Siegel, est l’exemple typique de cette tendance. La
trame fantastique est la métaphore de la peur du communisme,
qui est une réalité dans les années 50.
Des répliques des habitants de Santa Mira repeuplent
petit à petit la ville. Il est impossible de les différencier
des humains : l’ennemi fait déjà parti
de la société. La priorité est de le
démasquer. Car tout le monde se connaît à
Santa Mira, et il faut confondre les imposteurs. Cette donnée
peut ainsi être perçue comme une justification
de la "chasse aux sorcières". En effet, même
des individus "respectables" peuvent représenter une
menace, et même ceux qu’on aime peuvent être des
usurpateurs. Et comme le dit Becky "si nous fermons les
yeux nous risquons d’être changés en être
inhumains". Afin de garder leur intégrité,
les personnages doivent donc constamment garder les yeux ouverts,
car " ils sont déjà là ."
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Ces individus ont
comme seule particularité de ne pas avoir d’émotion :
faudrait-il voir dans cette donnée l’idée que
le communisme priverait les hommes de leur essence, à
savoir leur personnalité ? Sans aller jusqu’à
une lecture aussi extrême du film, on peut constater
que ces envahisseurs représentent une menace à
l’égard du fonctionnement parfait de la société :
les commerces ferment au fur et à mesure. La "peur
du rouge" est donc dans une certaine mesure inhérente
à l’écroulement de la dynamique économique,
du moins dans le film.
Plusieurs suppositions sont faites quant à l’origine
des cosses géantes : peut-être une menace
atomique ou bien le résultat des projets d’une "organisation
malfaisante". Ajoutons à ces supputations la théorie
du docteur Kaufman au début du film, lorsque Miles
Bennell s’interroge au sujet du comportement de la population :
leur paranoïa pourrait être liée à
des "soucis au sujet des évènements mondiaux ".
Autant de références à l’état
d’esprit des Américains à ce moment.
Invasion of the Body Snatchers est donc un film représentatif
de l’époque. Si on peut le lire comme une propagande
anti-soviétique à divers degrés, Hollywood
ne fait que mettre sur pellicule un filon estimé rentable.
C’est avec le même type d’intrigue que la science-fiction
engendrera plusieurs films tels Le jour où la terre
s’arrêta (1951) de Robert Wise ou Les soucoupes
volantes attaquent de Fred F. Sears.
UN " FLEAU "
MENACANT L’HARMONIE DE LA CELLULE FAMILIALE,
NOYAU DE L’AMERICAN
WAY OF LIFE
Bien établie dans les esprits,
la "menace rouge" est ressentie comme un danger gangrenant
la société américaine. Dans la logique
de "l’ennemi vient de l’intérieur ", certains
films montrent le déchirement de familles dont l’un
des membres est "corrompu" par le communisme.
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The Woman on Pier
13, un film de 1949 de Robert Stevenson, est l’exemple
parfait de cette psychose. Le réalisateur présente
la profession de foi d’un ex-communiste qui pour affirmer
sa rédemption mourra. S’il n’est plus un ennemi, le
personnage est présent dans les hautes sphères
de l'économie californienne. A partir de cette donnée,
on peut comprendre qu’il devient "primordial" de garder l’œil
sur son entourage.
Le film de Leo McCarey, My Son John (1952), traite
de la détresse d’une mère lorsqu’elle découvre
avec désespoir que son fils est un activiste communiste.
Le réalisateur souligne les dangers encourus par la
cellule familiale face à des réseaux qui "corrompraient"
de jeunes américains "bien tranquilles." My Son
John résonne comme une mise en garde à la
population. La classe moyenne doit rester vigilante en surveillant
ses enfants pour que ceux-ci ne se trompent pas de voie. C’est
également un appel au patriotisme à travers
la délation : John, comprenant son "erreur", choisit
de témoigner. Il sera abattu par le Parti.
Ce film représente un éloge de la société
américaine et de ses valeurs : famille et patriotisme
en sont le leitmotiv. La jeunesse américaine est décrite
comme influençable, mais finalement consciente, le
tout étant de faire le "bon choix", le témoignage
audio de John représentant un exemple pour les adolescents.
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