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Cyril Boussant (c) D.R.

Je me rends, accompagné de mes assistantes, à la Maison du Film Court, afin d’éplucher les fichiers de comédiens mis à disposition dans cette association : une trentaine de profils paraissent correspondre, mais je ne suis pas très emballé. Nous déposons également une fiche de projet dans laquelle nous décrivons les rôles à pourvoir.

En quelques jours, nous sommes submergés de coups de fils. Il faut dire que nous cherchons une dizaine de comédiens.  On commence à s’organiser afin de recevoir les candidats et leur faire passer des essais.

Parallèlement, les recherches de financement classiques, comme on s'y attendait, ne donnent rien : le projet est systématiquement refusé. Son personnage violent, sa narration non-conformiste et sa subjectivité revendiquée n'ont pas séduit les décideurs du CNC et autres officines étatiques. Aucune importance, il se fera quand même ! Dans un premier temps, 1001 Productions financera, sur ses fonds propres, le tournage. Pour la post-production, il sera toujours possible de demander d'autres aides plus spécifiques, notamment le Thécif qui soutient la post-production de films tournés sur support vidéo.

  Tournage de Tatouages (c) D.R.

Avec un budget extrêmement restreint, chacun se prépare aux aléas d'un tournage éprouvant : plan de travail ultra serré, journées à rallonge, récup obligée pour les décors et les accessoires, … On révise en conséquence à la baisse toutes les exigences, aussi bien techniques qu'esthétiques.

Malgré tout, la constitution de l'équipe démarre bien : j'ai déjà un chef-opérateur-cadreur (mon fidèle ami Nicolas), une costumière et un décorateur qui se charge également de la direction artistique.


Février 2002

Le casting démarre. Plus d'une cinquantaine de comédiens et comédiennes répondent à notre annonce et viennent passer un bout d'essai (une lecture) tout au long des six ou sept journées prévues. Je fais la connaissance de Daniel Collados, un jeune homme qui m'a été recommandé pour le rôle de Phil par une comédienne qui a passé le casting. Rencontre déterminante mais je ne le sais pas encore...

Daniel Collados (c) D.R.

Pour l'un des autres rôles principaux, je souhaite entrer en contact avec Salim Kechiouche (vu notamment dans Les Amants Criminels de François Ozon) afin de lui présenter le projet, mais son agent fait obstacle : il ne rappelle jamais, refusant également de nous mettre en contact direct avec le jeune comédien. Evidemment, un long-métrage fauché, tourné en DV, non rémunéré, n'intéresse pas un intermédiaire comme l'agent, payé au pourcentage ! L'acteur n'a probablement jamais eu connaissance de cette proposition, et il n'aura pas même son mot à dire dans la décision de faire le film ou non, tenu dans l'ignorance par celui qui est censé le promouvoir auprès des réalisateurs. Ce genre de situation est monnaie courante. Pourtant on peut se dire qu’un jeune acteur comme Salim Kechiouche ne doit pas crouler sous les propositions, il ne tourne d’ailleurs pas beaucoup. Quand on a la chance de pouvoir les rencontrer directement, les comédiens débutants acceptent très souvent de sacrifier leur cachet afin de pouvoir tourner dans un projet artistique qui leur permettra de s’exprimer plus librement. Mais leurs agents préfèrent les cantonner à des rôles dans des séries télévisées ou des rôles secondaires dans des longs métrages, rémunérés, certes, mais qui n’aident pas toujours à montrer le talent des jeunes acteurs.

Quant aux repérages, ils se poursuivent autour de Paris. Les négociations sont âpres avec les municipalités : il faut les convaincre de nous laisser tourner sur leur territoire sans les compensations financières qui sont désormais exigées systématiquement depuis qu’une loi est passée pour tarifer également le droit de s'exprimer avec une caméra. Cinq ans auparavant, on pouvait encore tourner librement dans les lieux publics. Aujourd’hui, il faudrait contribuer à limiter davantage encore les déjà trop rares oeuvres filmiques non financées et contrôlées par les chaînes ou les institutions culturelles.

Enfin, les régisseurs nous font faux bond les uns après les autres, sans doute effrayés par l'ampleur de la tâche, le budget serré, et le temps qu'ils doivent investir dans cette aventure. Et dénicher un ingénieur du son est plus délicat que prévu...