L’UNIVERS
DU FILM
Entrons plus en avant dans l’univers du film Le Roi
et l’oiseau. De quoi parle au juste ce film qui mit tant
de temps à se faire ? Prévert résumait l’histoire ainsi :
«C’est l’histoire d’un roi très mauvais qui a des ennuis
avec un oiseau très malin et plein d’expérience ; il y
aussi des animaux qui sont très gentils, deux amoureux et beaucoup
de gens épouvantables ».
| |
 |
|
|
En mettant en avant les personnages du roi et de l’oiseau
et non plus ceux de la bergère et du ramoneur (héros du conte
originel), Prévert et Grimault changent la portée du film.
Le Roi devient le symbole de la tyrannie, de la dictature
et de l’oppression tandis que l’oiseau devient l’allégorie
de la liberté s’opposant constamment au régime totalitaire
et despotique du roi Charles V et III font VIII et VIII font
XVI. Une dimension beaucoup plus subversive que l’histoire
d’amour entre la bergère et le ramoneur qui est au cœur du
film de 1953.
C’est d’abord cette thématique de l’éternelle lutte de la
liberté et de l’amour contre la cruauté qui a fondé le succès
du film. Une thématique principale enrobée d’un humour et
d’une ironie qui empêche de tomber dans le mélodrame pur.
 |
|
|
|
Ainsi d’une séquence avec le roi et un de ses sbires. Le
serviteur sait le roi très expéditif (les personnes qui le
dérangent finissant toujours par tomber dans des trappes)
et se doutant du traitement qui l’attend, il tente d’éviter
les trappes qui surgissent sous ses pieds en sautant partout.
Mais le plus savoureux reste l’appel d’un des gardiens (sur
ordre du roi) qui exhorte à attraper la bergère et le ramoneur
en fuite en ces termes : « Allo ! Allo !
Forte récompense ! Une charmante bergère et un petit
ramoneur de rien du tout…de rien du tout…sont recherchés par
la police de Sa Majesté (…) » Le fait de répéter
le terme « rien du tout » introduit juste
ce qu’il faut de dérision et révèle un sens du détail assez
poussé dans les dialogues.
L’œuvre comporte donc un aspect humoristique qui se retrouve
aussi bien dans ses dialogues que dans son graphisme. Une
originalité jamais vue dans le domaine de l’animation à cette
époque et qui a contribué à son aura de film mythique :
à la fois inventif, poétique, amusant et très attachant.
Pessimiste mais lucide, Grimault s’exprimait ainsi sur l’accueil
de son film par le public : « Je suis content
d’avoir fait Le Roi et l’Oiseau parce que ce qu’il raconte
est salutaire pour tout le monde et le sera encore pendant
des années. Ce n’est pas un film à message, mais il parle
de la façon dont le monde vit depuis un temps- et où il a
l’air de s’engager de plus en plus ».
|
