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IDEES

Je note parfois des idées sur des bouts de papier. J'ai toujours quatre ou cinq idées de scénarios d'avance. Je mets tout cela dans un dossier en attendant de pouvoir les écrire, mais le temps me manque pour le faire ! Dans mes sujets, il y a un peu d'observation, mais surtout une grande part d'imagination. Quand j'écris, je m'amuse à trouver des personnages, des situations... Je n'éprouve pas de difficultés à le faire. Pour Cousin Cousine, je me suis souvenu des nombreuses fêtes qui avaient lieu dans ma famille, d'origine méditerranéenne. Le Pays bleu est également un film autobiographique. Au début des années 60, quand je désespérais de faire des films, je m'étais installé en Provence car je n'avais pas assez d'argent pour vivre à Paris. J'habitais une vieille maison de campagne et je me souviens que c'était alors l'époque où les paysans commençaient à quitter le monde rural pour la ville, alors que les gens de la ville venaient par contre découvrir la campagne. De cette double migration, j'ai donc fait le film avec 70 acteurs, une fresque conçue à partir de cet échange. Je ne cherchais pas alors à être écologique, je faisais simplement un constat : j'avais trouvé amusant de voir ces deux communautés partir dans des directions différentes. Dans Voyage en grande Tartarie, j'avais mis tout ce que je n'aimais pas dans notre société : ce voyage à travers des paysages pétrochimiques ou une nature à la Walt Disney. Ces deux films sont un peu le positif et le négatif : Le Pays bleu réunit tout ce que j'aime dans la société, alors que Voyage en grande Tartarie contient tout ce que je déteste... Mes films se complètent souvent, un peu comme des puzzles.

LE TRAVAIL AVEC LES ACTEURS

  Objectif Cinéma (c) D.R.

Je travaille avec eux longtemps à l'avance, je les vois beaucoup, on parle des scènes... On cherche ensemble des détails du jeu, des choses concrètes : ce qui se verra sur l'écran, la manière dont ils seront habillés ou coiffés davantage que la psychologie des personnages.
J'aime organiser tout cela à l'avance pour qu'ils soient devenus véritablement le personnage au moment du tournage. De cette manière, je fais très peu de prises : la première est souvent la bonne. J'empêche les acteurs de répéter afin de garder la fraîcheur du jeu lors de la première prise.
Il m'arrive souvent de changer des éléments dans la direction d'acteurs en cours de tournage : si dans une scène, tel acteur est allé beaucoup plus loin dans l'expression d'un sentiment, la scène suivante doit contrebalancer ce moment intense. c'est un rééquilibrage permanent, un travail impressionniste.

(...) Avec Escalier C, je voulais faire un film où chaque motivation qu'avait l'acteur ou le personnage pour faire telle chose demandait deux explications possibles. Je disais aux acteurs pendant le tournage que ce qu'ils faisaient vis à vis des autres personnages pouvait être fait pour telle raison, mais aussi pour une autre. Et je voulais qu'on comprenne les deux. Dans mon téléfilm Cour d'assises, j'ai poussé le système à trois explications. Dans leur jeu, les acteurs devaient tenir compte des trois points de vue différents. Faire cela donne plus de profondeur au jeu. Escalier C a paru peut-être plus profond parce qu'il y a plusieurs interprétations possibles sur chacun des gestes des acteurs.

RYTHME ET MONTAGE

Objectif Cinéma (c) D.R.

Le montage ne change pas grand chose au rythme du film : tout est prévu dès l'écriture. Ceci dit, je coupe parfois à l'intérieur même des scènes, je gagne du temps sur les passages d'un plan à l'autre. Je trouve cela plus vif. Je fais rarement de vrais raccords. D'autre part, je fais rarement des plans de situation : j'essaie toujours d'être en action, pour le choix des plans. Au montage j'essaie de gagner du temps sur le temps, mais cela reste très proche de ce que j'ai écrit avant, mis à part les scènes particulières - des scènes de danse, par exemple, qui nécessitent l'emploi de plusieurs caméras.
Mes films ont souvent du mal à démarrer, je le reconnais. Mais je n'aime pas non plus attaquer très fort parce qu'il faut tenir le rythme ensuite ! La comédie de moeurs n'est pas forcément drôle, elle peut même être forcément drôle et cruelle. Mais mon problème n'est pas d'être drôle ! Je fais d'abord des films pour faire vivre des personnages. Même dans mes films qui passent pour les plus drôles, notamment Cousin cousine, je n'ai jamais mis quoi que ce soit pour faire rire ou sourire ! Il y a des choses qui m'amusent à écrire ou à tourner, mais je ne sais jamais ce qui fera rire. C'est différent des films comiques ou burlesques dans lesquels il faut absolument faire rire ! On peut voir une comédie de moeurs sans jamais sourire ! Quand Bunuel fait des comédies de moeurs, on n'est pas forcé d'être plié en deux !