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Objectif Cinéma : Un des thèmes qui revient souvent dans vos films, c'est le rapport aux personnes âgées...

Goran Paskaljevic : Il faut que j'arrête parce que je vais devenir moi-même âgé ! (rires)


Objectif Cinéma : Vous ferez un documentaire sur vous-même !

Goran Paskaljevic : Oui, ça va finir comme ça ! Avec une caméra qui tremble ! (rires)


Objectif Cinéma : On retrouve de beaux personnages de grands-parents dans Tango argentino ou Mes amours de 68, quant aux parents...

Goran Paskaljevic : Ils sont très vilains ! C'est comme ça dans la vie ! Les vieux ont une sagesse, ne pensent pas à gagner plus d'argent, et sont moins conformistes. Ils sont plus proches des jeunes qui ne le sont pas du tout conformistes. Les 40-50 ans cherchent à protéger leur argent, acceptent tous les compromis possibles en politique. C'est une génération qui peut perdre ce quelle a gagné en biens matériels. Les jeunes et les vieux sont toujours plus révolutionnaires, les vieux parce qu'il ne leur reste plus d'autre chose à faire qu'être gai dans la vie !

Ce thème qui revient souvent dans mes films vient certainement de mon enfance passée avec mes grands-parents, car mes parents étaient divorcés. Mes grands-parents étaient très croyants et je me souviens de ma grand-mère qui priait tous les soirs pour le lendemain : ce sont des choses qui vous restent ! Ils étaient formidables, avec un esprit libre. Ma grand-mère était croyante mais n'allait jamais à l'église. Elle n'était pas pratiquante. Mon grand-père était beaucoup plus libéral, il était de gauche.


  Baril de poudre (c) D.R.

Objectif Cinéma : Mes amours de 68 a un petit parfum autobiographique...

Goran Paskaljevic : Un petit peu, oui... (sourire).


Objectif Cinéma : Il est amusant de voir que contrairement à beaucoup de cinéastes qui débutent par un film autobiographique, vous avez tourné Mes amours de 68 quelques années après avoir commencé à faire du cinéma..

Goran Paskaljevic : Ce n'est pas non plus tout à fait un film autobiographique. C'est aussi un hommage aux films tchèques de ma jeunesse, à ces petites histoires rigolotes... A chaque film, vous utilisez des choses, même inconsciemment, autobiographiques. Mon scénariste Gordan Mihic vient décrire un scénario à partir d'une de mes idées. Je suis en train de l'adapter : il y a notamment une séquence de funérailles, moment tragique. Je me suis alors rappelé l'enterrement de mon père; il pleuvait, je crois bien que c'était le moment le plus tragique de ma vie, et soudain, comme le cimetière était en pente et qu'il pleuvait, les gens ont commencé à tomber l'un après l'autre ! Je me suis mis alors à rire ! C'est ce détail qui m'est revenu au moment où j'ai écrit cette scène d'enterrement. Vous vous adressez sans cesse à votre propre expérience, à vos propres souvenirs. Ce sont souvent les moments les plus touchants et les plus réussis dans les films.


Objectif Cinéma : Il y a dans L'Amérique des autres une séquence très réussie : le retour fictif de la grand-mère au village.

Goran Paskaljevic : C'était très difficile de faire une telle scène. Je me suis dit personne ne va y croire. On ne peut pas dire quelle est bête, quelle ne sait pas où elle est, on a alors rajouté les pilules quelle avale pour dormir dans l'avion, mais quand elle se réveille, elle affirme entendre New-York. Et son fils de lui dire que c'est le bruit qui va lui rester dans les oreilles pendant des mois... Il y a dans ce genre de scène une limite du pathétique qu'il ne faut pas franchir tout en restant émouvant. Je n'ai pas peur de montrer des émotions très fortes. Je ne suis pas un type trop cérébral. Je prends la vie d'abord avec le cœur. A 50 ans on est forcément plus désillusionné qu'à trente ans. Malgré tout, je suis encore plein de curiosité et prêt à débuter tout de suite une nouvelle carrière.