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La Vierge des tueurs (c) D.R.
Objectif Cinéma : Est-ce que tous les acteurs du film étaient colombiens ?

Barbet Schroeder : L'acteur principal est de Medellín lui-même, ou disons de la région, et les autres interprètes sont des acteurs que j'ai trouvés en cherchant beaucoup, parce que je voulais qu'ils soient beaux, et donc ça n'était pas facile. Je les ai cherchés dans la ville, ce sont des acteurs des rues de Medellín : ce ne sont pas des tueurs, je n'aurais pas pu mettre en scène de vrais tueurs, mais c'est ce qu'il y a de plus proche de la vérité. Ils viennent des mêmes quartiers, ils parlent le même langage, ils ont la même manière de s'habiller ou de bouger.


Objectif Cinéma : C'est d'autant plus difficile que le taux de mortalité est très élevé et l'espérance de vie extrêmement limitée.

Barbet Schroeder : Oui, effectivement. Malheureusement, les gens qui ont 21 ans là-bas, dans ces milieux-là, parlent comme si c'était des retraités.


Objectif Cinéma : Est-ce que l'auteur ou le réalisateur ont voulu glisser quelques instants d'espoir dans le film ou est-ce qu'il n'y en avait vraiment aucun ?

Fernando Vallejo : Au lieu de parler d'un espoir de vie, pourquoi ne pas parler d'un espoir de mort. Puisque nous devons mourir, pourquoi rêver que nous serons immortels. Il faut parler d'espoir de mort. A Medellín, les garçons des communas, c'est-à-dire des quartiers rivaux qui entourent la ville sur les pentes des montagnes, meurent très jeunes, à 16, 17 ou 18 ans. Au commencement du film, on voit un petit enfant de 12 ou 13 ans qui dit " Nous sommes nés pour mourir ". Ce n'est pas une phrase que j'ai inventée, j'ai entendu moi-même des enfants de son âge dire cela. Donc, nous sommes nés pour mourir, pourquoi parler d'espoir de vie ?

Barbet Schroeder : Effectivement, c'est la réalité de cet endroit, et ce film témoigne de la réalité de cet endroit. On pourrait quand même dire que, si on voulait absolument trouver de l'espoir dans ce film, l'espoir est dans les moments de bonheur que vivent ces deux personnages, pendant plus d'une demi-heure de film. Il y a beaucoup d'espoir dans cette histoire d'amour. C'est une histoire d'amour impossible, ce n'est donc pas du vrai espoir, mais ce sont quand même des moments magiques qu'il y a entre eux, et c'est ça aussi le centre du film. Le film est construit comme une musique entre deux regards, celui d'un adulte sur un jeune homme et celui du jeune homme sur l'adulte.


  Sauvage Innocence (c) D.R.

Objectif Cinéma : Est-ce que vous avez rencontré des problèmes de tournage ?

Barbet Schroeder : Oui, des problèmes de tournage, bien sûr. Ce n'est pas complètement facile de tourner à Medellín, il faut s'entourer de précautions : ça suppose bien entendu d'avoir des gardes du corps pour moi, pour la caméra, et des gens en armes sur le tournage, des policiers qui surveillent pour qu'il n'y ait pas de problèmes. On était obligé d'en avoir un certain nombre, parce que s'il y en avait trop peu, ils pouvaient être attaqués et tués pour qu'on leur vole leurs armes, il fallait en avoir suffisamment pour qu'ils ne se fassent pas tuer.

Mais, à part ça, on a eu quelques menaces de mort, quelques chantages, quelques menaces diffuses qui créent une atmosphère de paranoïa, mais on n'a pas eu de vrais problèmes puisqu'on est arrivé à terminer le film comme prévu, soit en environ quarante jours. Moi, je ne pensais pas qu'on arriverait à terminer le tournage à Medellín : j'avais tout préparé pour qu'on termine dans une autre ville de Colombie, ou même encore, si c'était plus grave, pour qu'on aille terminer au Mexique. On a eu la chance de terminer le film, donc pour moi ça s'est très bien passé, et j'étais très heureux, je n'ai jamais passé de moments aussi exaltants de ma vie : il y a plus de tension sur un gros film hollywoodien avec des stars et un studio derrière, que dans les rues de Medellín.


Objectif Cinéma : C'est la première fois que vous abordez la Haute Définition ?

Barbet Schroeder : C'est la première fois pour qui que ce soit : c'est le premier film réalisé en Haute Définition, qui est donc quelque chose de complètement différent de la vidéo, puisque c'est une définition qui est plus grande ou aussi grande que celle du cinéma et dans laquelle il y a plus de profondeur de champ, ce qui m'a permis d'avoir une présence très forte de la ville dans tous les plans.