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  La Chambre obscure (c) D.R.
Objectif Cinéma : Parlez nous de la toile avec la tête coupée... Ce tableau semble fonctionner comme un signal secret.
Il y a un jeu avec la castration, une note d'humour par rapport à l'artiste toujours confronté à des problèmes, sur l'obstination qu'il a fallu avoir pour aller jusqu'au bout. Par exemple, je me suis cassée la jambe dans la préparation du film, mais cela ne m'a pas empêché de continuer...

Marie-Christine Questerbert : Mais j'ai l'impression que la toile répond au scénario, l'histoire de cette femme qui essaye de mettre la lumière sur son visage face à ce mari, Bertrand. A la fin, elle dit bien "n'aie pas peur, je resterai dans l'ombre". Aliénor s'appelle Gillette dans le conte de Boccace. J'ai fait là aussi une transposition. Gillette, c'est très joli, mais...


Objectif Cinéma : C'est la publicité pour les rasoirs !

Marie-Christine Questerbert : Oui ! (rire) C'était trop surdéterminer le personnage que de lui donner ce nom-là !


Objectif Cinéma : Le casting est très intelligent. Son hétérogénéité est une force. Chacun des comédiens apporte une profondeur.

Marie-Christine Questerbert : Le film est une belle rencontre d'acteurs. Je les ai tous vus à des moments très différents. J'ai rencontré Sylvie Testud avant qu'elle ne fasse Karnaval (Thomas Vincent, 1999), je connais Melvil Poupaud depuis qu'il est petit : un jour je tombe sur lui dans un bar et je lui dit "toi, je te retiens !". Nous avons une fidélité réciproque qui fait que je peux lui parler aussi directement. Il a dû se dire ensuite qu'il y avait eu un sacré bout de temps entre le moment où je lui avais dit ça et le tournage !


La Chambre obscure (c) D.R.

Objectif Cinéma : Caroline Ducey nous rejoint pour discuter. Elle commence gaiement :

Caroline Ducey : Et un soir, dans un autre bar où il se trouve, tu lui dis, en lui tapotant l'épaule : ç'est prêt ! (rire)

Marie-Christine Questerbert : Et c'est vrai ! Pour toi, Caroline, c'était bien avant Romance, à l'époque de Trop de Bonheur en 1994 (Cédric Kahn). Je voulais absolument que ce soit toi qui joue le rôle d'Aliénor. Le projet était bien avancé et ce fut alors la bagarre durant trois semaines au téléphone pour t'imposer au producteur qui voulait une autre actrice. Je crois avoir assez d'instinct pour les acteurs, car mon frère Hugues Quester qui joue Ambrogio m'a habitué à vivre auprès des comédiens, à les sentir. Il a commencé tôt à faire du théâtre, à l'âge de quatorze ans. D'ailleurs, c'était un peu le choc dans la famille, son choix n'était pas évident. Avec ma sœur, nous le suivions, j'allais le voir jouer avec Maria Casarès. J'allais à tous ses spectacles et je côtoyais tous ces comédiens, metteurs en scène. Pour moi l'acteur, c'est quelqu'un de proche, il y a une proximité. C'est de l'ordre de la sensation.

Ambroglio est une énigme, il secrète une lourdeur ou du moins il creuse le plan alors que Thomas, autre figure de l'artiste/peintre est du côté du mouvement, il ne cesse de marcher et de parcourir les rues, il sort de l'atelier, il appelle la perspective, raison pour laquelle il ne peut pas vivre une histoire d'amour avec Aliénor, il n'appartient plus aux codes de la miniatures et de l'à-plat.

Thomas articule alors qu'Ambrogio est un pivot : les deux sont là La fonction du peintre, véritable chef d'atelier, était de faire le visage, et ses apprentis devaient faire le reste du corps et le paysage. Il y avait une division du travail. Ambrogio fait fond et ma réflexion venait de cette problématique : qui fait fond et sur qui ? Sur quoi fait fond Aliénor ? sur la médecine et elle devient ce fond de la médecine pour son père, lorsqu'elle tend la toile noire. De même, après, sur quoi fait-elle fond pour se rapprocher de Bertrand ? Elle fait fond sur le Roi. Il y a ainsi une dynamique du fond, un mouvement du film où quelqu'un fait toujours fond sur quelqu'un d'autre.